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“Israël est un pays raciste où la question de la pureté de la race est sans cesse posée”

posté le 08/01/17 par Avi Mograbi Mots-clés  répression / contrôle social  antifa  Peuples natifs 

Projeté au Cinéma du réel, “Entre les frontières” traite de la situation tragique des réfugiés africains en Israël. Rencontre avec son réalisateur engagé à gauche, l’Israélien Avi Mograbi.
C’est l’un des meilleurs ennemis des dirigeants de l’Etat hébreu. Un insider critique qui ne mâche ni ses mots ni ses images. Depuis des années, Avi Mograbi poursuit une œuvre sans concession faites de documentaires où il paie souvent de sa personne pour remettre en question les grands mythes fondateurs de son pays.

Avec Entre les frontières, le documentariste s’attaque cette fois au sort qu’Israël réserve aux migrants fuyant des conflits ou des régimes sanguinaires. Venus principalement du Soudan ou d’Erythrée, ces derniers ne peuvent être renvoyés chez eux. Considérés comme de dangereux infiltrés, ils sont maintenus dans une zone de non-droit, sans statut ni perspective d’intégration.

La première idée de Mograbi pour son film ? Faire raconter par des demandeurs d’asile africains l’histoire de migrants juifs fuyant leurs persécuteurs… De quoi faire réfléchir ses concitoyens dont il déplore le manque d’empathie envers les réfugiés. Avec l’aide de Chen Alon, un metteur en scène réputé en Israël, Mograbi a finalement proposé à des immigrés détenus par Israël au camp d’Holot, un centre de rétention dans le désert du Néguev, de participer à un atelier-théâtre. Pas n’importe quel théâtre puisqu’il s’agit de leur faire raconter leur histoire selon les techniques du Théâtre de l’Opprimé, théorisé par Augusto Boal dans l’Amérique latine des années 70. Nous avons rencontré Avi Mograbi. Toujours aussi engagé, à gauche, et pessimiste.

Comment vous-êtes vous intéressé à la question des demandeurs d’asile en Israël ?

Comment ne pas s’y intéresser ? Impossible de l’éviter, ou plutôt si, on peut si on veut. Il y a 50 000 demandeurs d’asile africains en Israël. C’est beaucoup pour un petit pays de huit millions d’habitants. Dans la banlieue sud de Tel Aviv par exemple, ils sont partout. Ils y vivent, travaillent dans les restaurants, les bars, les hôtels, dans le secteur de services surtout mais aussi dans des entreprises de nettoyage ou dans le bâtiment. Quand on commence à se se tenir au courant des efforts fournis par le gouvernement pour ne pas traiter ce problème ou plutôt pour l’éliminer de façon inhumaine, on devient de plus en plus concerné. C’est ce qui m’est arrivé.

La situation de ces réfugiés a-t-elle empiré ces dernières années ?

Ils ont commencé à affluer vers 2007, peut-être un peu avant. Ils viennent du Soudan, ravagé par la guerre du Darfour, et d’Erythrée, dont ils fuient le régime dictatorial. De quelques milliers de migrants, les quartiers pauvres de Tel Aviv sont donc passés à plusieurs dizaines de milliers. C’est là que les problèmes ont commencé car les infrastructures de ces endroits, négligées depuis toujours, ne sont tout simplement pas faites pour accueillir une telle quantité de personnes.

L’écrasante majorité d’entre eux sont noirs – imaginez le changement dans un pays à majorité blanche ! – mâles, sans ressources. Beaucoup d’entre eux sont au chômage, la plupart sont mal logés, entassés dans des appartements trop petits et insalubres. Bref, c’est un problème. On pourrait donc penser qu’un gouvernement digne de ce nom, ou une municipalité, s’en emparerait pour le régler. Ce n’est pas le cas.


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