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Religions, nations, identités, communautés : y’en a marre !

posté le 06/06/18 Mots-clés  réflexion / analyse 

A bas les communautés imaginaires ! Vive l’humanité !

Marie L., la "mytho" du RER D, a tout compris. Aujourd’hui, il faut parler le langage communautaire ou ethnique - en clair racial - pour être entendu. Que l’on soit désireux d’attirer l’attention sur sa solitude, ou son mal-être, ou que l’on soit victime d’une véritable discrimination, il faut avant tout susciter la compassion, jouer sur le registre des bons sentiments.

De Chirac (1) à l’ex-président du CRIF Alain Jakubowicz (2), de Le Pen à Dieudonné (3), tous parlent le langage de l’ethnie (qui n’est qu’un mot politiquement correct pour la race) ou de la religion. Ils n’ont à la bouche que des mots qui divisent les êtres humains entre eux : « Blacks », « Blancs », « Beurs », « Gaulois », « Feujs », « Renois », « communauté juive », « communauté musulmane », « valeurs chrétiennes », etc. Tous ces mots incitent chacun à se replier sur une identité imaginaire, censée être radicalement différente et de fait, qu’on le veuille ou non, supérieure aux autres.

Voilà le résultat des propagandes conjuguées, depuis trente ans, du Front national et de SOS Racisme ; des associations juives, chrétiennes et musulmanes qui veulent remettre en cause, ouvertement ou insidieusement, la laïcité ; des féministes bourgeoises et carriéristes qui ont voulu remplacer la lutte des classes par la lutte des sexes ; de tous les intellectuels, journalistes ou politiciens catholiques ou protestants qui envahissent l’espace public avec leur propagande religieuse ; de tous les adeptes des « nouvelles spiritualités » qui plastronnent dans les médias avec leurs visions apocalyptiques et leurs pseudo-concepts, etc.

Il y a trente ans, définir quelqu’un d’abord et avant tout par la couleur de sa peau, son sexe, son ethnie ou sa religion était considéré comme discriminatoire par les véritables antiracistes, par les véritables féministes. Il y a trente ans, les mouvements radicaux ou révolutionnaires souhaitaient changer le monde, l’humanité au nom d’idéaux universels : le socialisme, le communisme, la fin de l’exploitation et de l’oppression de l’homme par l’homme, l’avènement d’un monde sans classes, ni Etat, ni argent.

Aujourd’hui, avant de proclamer son appartenance universelle à l’humanité, on doit d’abord et avant tout se revendiquer d’une couleur de peau, d’une ethnie (traduire d’une race), d’un « genre » (traduire d’un sexe), d’une préférence sexuelle (hétéro, homo, trans, bi ou - chic ultime - queer) ou d’une religion déterminés.

Nous voilà revenus plusieurs siècles en arrière, avant les Lumières, en plein Moyen Age obscurantiste, au temps où l’on combattait les Barbares, les Infidèles, les Huns et autres fariboles qui ont dressé pendant des siècles les peuples, les êtres humains, les uns contre les autres.

Quoique ses dirigeants prétendent, la France est devenue de fait multiculturaliste, communautariste, avec l’aide et la complicité de presque toutes les forces politiques, de l’extrême droite à l’extrême gauche.

Il est donc « normal » que cette marée identitaire imprègne non seulement les fantasmes de Marie L., mais les revendications de toutes les communautés imaginaires : homosexuels, lesbiennes, femmes, immigrés, Arabes, musulmans, juifs, Africains, Antillais, etc. La liste est extensible à l’infini et peut se fragmenter aussi à l’infini : les lesbiennes antillaises, les homos musulmans, les juifs hétéros, les cathos transexuels, les protestants travestis, etc. Toutes les micro-identités se bâtissent des forteresses idéologiques au nom de la « tolérance » et de « respect ».

Et la logique de ce processus est bien connue, puisqu’elle prédomine - légalement ou pas - dans l’immense majorité des pays de la planète : chaque communauté imaginaire se défend contre les autres soit à coups de machette et de kalachnikov, dans les sociétés où l’Etat central n’a pas réussi à s’imposer par la force à tous les « citoyens » qui vivent sous sa coupe ; soit dans les pays dits « démocratiques », à coups de lobbies qui imposent des lois restreignant de plus en plus la liberté d’expression, la liberté de conscience, toutes les libertés, et qui donnent aux dirigeants communautaires la possibilité de faire régner un ordre répressif dans « leur » communauté, tout en instaurant un climat étouffant dans toute la société.

C’est ainsi qu’en Angleterre vient d’être votée une loi contre le blasphème ; qu’au Canada existent des tribunaux religieux dont les décisions en matière de conflits conjugaux ou de justice civile, ont force de loi ; ou qu’en France on a voté, ou l’on nous prépare, tout un arsenal de lois qui, sous prétexte de lutter contre le racisme, l’antisémitisme, l’homophobie, le sexisme, etc., ne font qu’encourager l’idée qu’il faut faire partie partie d’un lobby, d’une communauté, d’une Eglise, pour se défendre.

Et tant pis si en ayant recours systématiquement et aveuglément à la justice bourgeoise on met en taule des centaines de maris ou d’enseignants accusés à tort par leurs épouses ou leurs élèves de pédophilie, etc. Tant pis si l’on fait passer toute critique d’Israël pour antisémite. Tant pis si l’on ne peut plus critiquer l’islam sans être accusé d’« islamophobie ». Après tout, on ne fait pas d’omelette sans casser des œufs, semblent nous dire les partisans du tout-juridique et du tout-répressif.

Cette dynamique égoïste, répressive, des lobbies, des communautés fondamentalement insensibles aux souffrances des autres communautés, cet arsenal juridique envahissant et omniprésent, loin de rapprocher les êtres humains, ne font qu’éloigner les hommes et les femmes enfermés dans leurs identités imaginaires, obsédés par la préservation de l’identité et des intérêts (traduire la « pureté ») de leur race, de leur ethnie, de leur religion, de leur « genre ». Le prétendu « respect des différences » n’est que le respect des murs que les ethnies et les religions, les hommes et les femmes construisent entre eux pour mieux se combattre et s’audétruire.

Ce dont l’humanité a besoin ce n’est pas de plus de lois, plus de répression étatique, c’est de davantage de solidarité, de fraternité, entre les exploités, entre les opprimés, quels que soient leur sexe, leur religion (ou leur absence de religion) ou leur ethnie d’origine.

A bas les communautés imaginaires ! Vive l’humanité !

Y.C.

1. Avec son crapuleux « juifs, musulmans… ou tout simplement Français », Chirac est dans la droite ligne de Raymond Barre qui avait déclaré, en 1980, à propos de Copernic « Cet attentat odieux, a voulu frapper les Israélites qui se tendaient à la synagogue, il a frappé des Français innocents qui traversaient la rue ».

2. « Les plus dramatique, c’est que cette jeune femme ait cru qu’elle était crédible en affirmant qu’on l’avait prise pour une juive et que ses agresseurs étaient d’origine black et beur. Et le pire, c’est qu’elle a été jugée crédible, parce que cela se passe tous les jours. » (Libération du 14 juillet) Affirmations proprement écoeurantes : d’une part la racisation de la populaire d’origine africaine, antillaise et arabe sous les termes de « Black » et de « Beur », mots qui font partie du vocabulaire racial, même s’ils ont été repris à leur compte par une partie des « intéressés » et de leurs prétendus défenseurs (SOS-Racisme) ; d’autre part, l’affirmation totalement fantaisiste selon laquelle « tous les jours » des personnes d’origine africaine ou arabe s’attaqueraient au couteau à des jeunes femmes.

Et cet avocat qui aime alimenter les tensions en remet une louche le lendemain dans le même journal : « les agresseurs sont dans la quasi totalité des cas des jeunes issus de l’immigration arabo-musulmane ». Faux-jeton, notre Ponce Pilate dénonce la « stigmatisation des jeunes de banlieue et de la communuauté musulmane » après s’y être lui-même livré à deux reprises ! Trois lignes plus loin, en bon bobo « branché », il croit utile de reprendre à son compte sans les moindres guillemets, sans en faire la critique, les termes de « feuj, beur ou black » et recommence à stigmatiser « l’antisémitisme de jeunes de banlieue ». Et pas un mot pour dénoncer le seul racisme qui tue depuis plus de trente ans en France : celui des « bavures » policières, des « ratonnades », qu’elles soient l’œuvre du FN, des néo-nazis, des flics, ou de bandes locales, et de tous les meurtres de voisinage au cours desquels sont régulièrement descendus de jeunes immigrés ou enfants d’immigrés.

3. S’il s’était contenté de son douteux sketch télévisé, l’affaire n’aurait sans doute pas été très loin. Mais Dieudonné, dans un trip de toute-puissance à la Chirac (« C’est regrettable, mais je ne regrette rien » a en effet déclaré le Président à propos de l’affaire du RER D) a tenu à en rajouter plusieurs louches successives en dénonçant les juifs « négriers reconvertis dans la banque » puis en précisant : « Des Juifs, je ne dis pas tous les Juifs, des Juifs ont profité de la traite négrière ». Non seulement Dieudonné ne connaît rien à l’histoire de l’esclavage (en effet, les principaux acteurs de la traite négrière en Afrique étaient arabo-musulmans et les principaux profiteurs occidentaux étaient de bons chrétiens sudistes) mais en plus il reprend à son compte un vieux mythe diffusé par la Nation de l’Islam, l’organisation musulmane américaine, nationaliste noire et antisémite de Louis Farakkhan.

http://mondialisme.org/spip.php?article356


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