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AHMED blessé par balles policières, procès du 23 mai 2019 en appel

posté le 25/05/19 par I Mots-clés  luttes sociales  répression / contrôle social  sans-papiers  solidarité 

AHMED ELASEY
Compte-rendu libre de l’audience du 23 mai 2019 - Cour d’appel de Bruxelles

C’est sous la bannière de "Homeless Lives Matter" et "Liberté pour Ahmed" que c’est tenu le rassemblement afin de témoigner publiquement du soutien à cette personne sans domicile fixe dont la vie nous importe. En première instance M. Ahmed Elasey fut condamné à 5 ans d’emprisonnement ferme sous l’inculpation de "tentative de meurtre", qui plus est sur 4 policiers. (voir texte d’appel )

Afin d’assister à l’audience il est requis par le dispositif policier placé devant la salle de remettre sa carte d’identité, identité recopiée sur une liste, ouvrir les sacs qui sont fouillés, remettre son téléphone mobile et enfin être scanné.e.s !

L’audience commence par la constatation que M. A. Elasey n’est pas présent. En effet, il n’a pas réussi à affronter la cour, angoissé notamment par les conditions de détention prévues dans l’attente du procès. Il est actuellement toujours muni d’un appareillage de stomie. Il s’agit ici d’une des conséquences de sa blessure par balle dans l’abdomen.
Alors qu’il parait aisé de comprendre l’angoisse de la victime en piètre état de santé de se présenter devant une cour similaire à celle qui l’a condamné précédemment à 5 ans de prison, l’avocat de la police lui, se permettra de considérer ce "refus" comme une preuve supplémentaire du manque de considération qu’il aurait des autorités !

Ses avocat.e.s étant autorisé.e.s à le représenter, le procès débute par la lecture de la juge rapporteur qui indique des modifications aux préventions retenues. Lors du précédent procès la "tentative de meurtre" fut retenue en ce qui concerne quatre policiers, on propose ici de transformer la charge en "menace par geste" ne serait-ce contre 3 des 4 policiers. L’autre prévention concerne une rébellion avec acte et enfin, en ce qui concerne "l’arme prohibée" une requalification est à faire pour désigner un "objet tranchant, contondant, ..."
Il est précisé que la précédente juge a fait confisquer l’ensemble des biens, alors que seul le couteau doit être confisqué, que M.A. Elasey n’a pas d’antécédents judiciaires et qu’il est en détention depuis le 18/9/19. Une relation des faits suit, se fondant principalement sur les témoignages d’un grand nombre de policiers dont les récits concordent.

Vient alors le tour de l’avocate générale qui d’emblée affirme qu’il est évident que M. A. Elasey voulait en découdre avec la police. D’ailleurs vu la "gravité des faits" elle réclame 10 ans d’emprisonnement.

Le récit des différents policiers qui sont intervenus, et en particulier celui qui a tiré sur la victime, indique que la police avait l’instruction de faire "déloger" les gens sur le trottoir, ou encore que "le policier a chambré son arme mais pas pointé", qu’il y a eu des injonctions "jette ton couteau" sans succès et que M. A. Elasey aurait continué à avancer vers le policier qui était en uniforme ... Pourtant cette version des faits ne semble pas corroborée par divers éléments que la défense fera valoir. La justification des tirs étant que le policier se trouvait face à quelqu’un qui n’a pas obtempéré et blessé un collègue au crane.

L’avocate générale conclut qu’il s’agit d’une infraction d’une extrême gravité, mais non, pas celle d’avoir tiré sur un être humain, non, celle de n’avoir obéi aux injonctions des forces de l’ordre et n’avoir pas lâché son couteau.

L’avocat du policier tireur et de la zone de police Bruxelles prend la parole. Il commence par décrire le parcours professionnel du tireur et rapporte ensuite les faits tels que décrits par la zone de la manière suivante " deux sections de 5 hommes" ont été envoyées par la zone pour "inviter à déguerpir les gens qui vivent dans les porches"...
S’en suit la relation des faits tels que ceux du gaz pulvérisé et des coups de matraques assénés à ce récalcitrant personnage, que du renfort a été appelé, que la deuxième section parmi laquelle se trouve le policier tireur arrive (une dizaine de policiers contre un sdf). L’avocat explique que M. A. Elasey "malgré les coups de matraque et les projections de gaz se trouvait "dans un état de fureur" et voulait "en découdre" (expression très fréquemment utilisée par la police).
Le policier tireur a appliqué les instructions d’effectuer des "tirs bouteille" et a touché par deux balles M. A. Elasey. Ce faisant, il a respecté ce qui est prévu par sa hiérarchie. Plus tard "mon client a exécuté les ordres qui lui sont donnés, il faisait simplement son job".

L’avocat se plaît ensuite de décrire M. A. Elasey comme ayant une personnalité d’une "extrême gravité", il s’agit d’un délinquant de droit commun qui n’a aucun respect pour notre société". A noter un lapsus "c’est un homme sans valeur" (!) Pour étayer ses dires il dit que d’ailleurs quatre jours avant les faits il s’est rendu dans un endroit où il a pu se doucher (!) donc il vit volontairement dans la rue, s’il a le droit d’aller prendre des douches, c’est évident non ? Il a par ailleurs le culot de considérer que son abri c’est chez lui, il est donc dans la négation de notre société, c’est ce qui démontre qu’il veut attenter à la vie de policiers". Quelle démonstration époustouflante ! D’ailleurs "M. A. Elasey n’a aucun remords et n’est pas venu au procès", "le policier tireur lui n’est pas venu car il a peur !..."

L’avocat lit ensuite de larges extraits de l’article écrit par Selma Benkhelifa (avant d’être l’avocate de M. A. Elasey)... Celle-ci précisera à la cour qu’il n’y a pas lieu de confondre ses idées personnelles exprimées dans un article pour condamner son client.

L’avocat demande des dommages moraux et matériels pour ses clients, notamment les consultations psychiatriques du policier tireur.
Pour la zone de police il réclame 22.566 à titre de dommage économique...

Le ton de l’avocat tout au long de sa plaidoirie choque par sa rudesse, des phrases telles que, en parlant de M. A. Elasey " il se précipite avec son couteau et se dirige vers le policier dans le but de l’embrocher"...

Vient ensuite la défense qui présente les nombreuses contradictions étayées par des éléments de l’enquête comme la rapidité des coups de feu qui démentent les dires du policier. Elle explique également que vivre dans la rue ne relève pas d’un choix, et que ne pas obtempérer n’est certes pas souhaitable mais ne constitue pas une tentative de meurtre. Se débattre les yeux aveuglés par les gazages répétés non plus d’ailleurs.
Elle précise que le fait d’avoir accès à une douche ne signifie pas avoir accès à un logement ! Loin s’en faut, vivre dans la rue n’est pas un choix.
Le décodage juridique démonte aussi la charge de tentative de meurtre, rappelle que le couteau n’était qu’un objet utilisé à des fins culinaires ou encore qu’il n’y avait pas d’intention de tuer ni même de blesser comme cela a été dit lors des interrogatoires.
Le défense demande le sursis.

Verdict le 21 juin 2019


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