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APPEL à "Avis à la population"

posté le 24/04/14 par Celine Rallet et Sarah Antoine Mots-clés  action  luttes sociales 

APPEL A « AVIS A LA POPULATION »

CECI EST UN APPEL QUI S’ADRESSE A TOUTES ET A TOUS :

A l’heure actuelle, il y a urgence, au regard du mépris dans lequel nous, les pauvres, les chômeurs, les artistes, avec ou sans papiers sont tenus, d’informer la population de la réalité de nos situations et de nos vies.

L’Etat qui inflige aux pauvres, aux chômeurs, aux artistes des lois injustes, nie la réalité de nos existences. Deux lois ont été votées récemment qui ont pour conséquence imminente la plongée dans la misère de 55 000 personnes, ainsi que la réduction immense des moyens permettant aux artistes de créer.

Pour contrer une politique qui fait de nous des « Assistés », des « Privilégiés », des « Fraudeurs », des « Gens en trop »,

FAISONS SAVOIR AU MONDE ENTIER QUELLE EST LA REALITÉ DE NOS VIES,
CAR NOS VIES COMPTENT.

Ceci est donc un appel à ce que vous écriviez chacune et chacun un texte que nous proposons d’appeler « Avis à la population », c’est à dire un texte qui s’adresse à la population et qui témoigne de la réalité de nos vies, des difficultés innombrables auxquelles nous devons faire face, de nos persévérances obstinées, de nos convictions, de nos robustesses et vigueurs.

Cet appel à écrire et témoigner s’adresse à tous indifféremment : les pauvres, les chômeurs, les artistes, les spectateurs, les cinéphiles, les directeurs de théâtre, les ouvriers, les secrétaires, les fleuristes, les chauffeurs de bus et de taxi, les étudiants, les artisans, les aînés, les médecins, les boulangers, les sidérurgistes, les agriculteurs, les juristes, les psychanalystes, les professeurs, les pensionnés, les carrossiers, les mères et pères de famille, les enfants, les caissières…. Tous ceux qui touchés ou non, se sentent concernés.

Ces « Avis à la population » seront distribués, lus, affichés sur les marchés, dans les théâtres, devant l’ONEM, devant les organismes de paiements, dans les transports en commun, devant les cinémas, dans la rue, devant les écoles… Partout où nous le voulons.

Nous voulons par là faire découvrir nos situations, faire savoir à la population que nous ne sommes pas de trop, et affirmer une dignité qui nous est déniée.

Nous aimerions pouvoir rassembler les textes d’ici le 12 mai 2014 ou au plus vite.

Les textes pourront être anonymes ou signés, et envoyés sur les deux adresses mail suivantes :

sarahantoine007@hotmail.com et celinerallet@yahoo.fr

Nous espérons dans un premier temps en recueillir une trentaine, avant de commencer à les distribuer, lire, afficher.

Cet appel à écrire relève aussi d’un désir de rencontres. Une rencontre sera donc organisée avec les auteurs de ces Avis à la population.

A vos plumes,

Céline Rallet et Sarah Antoine,
Pauvres, chômeuses, artistes.

Ci dessous un Avis à la population écrit en 2012

Avis à la population

Je pense, je conçois, j’imagine, j’écris, j’entend palpiter le bruit du temps, je pratique un art, je présente le monde et en représente lessaillies, je transmets mon savoir, j’écoute la musique, je compose de lamusique, je partage mes lectures, je me tiens au plus près du monde, j’écoutebeaucoup, je parle beaucoup, je veille à faire chanceler les consensus, àbousculer les lieux communs, je prend la parole, je prend des risques, jerencontre des gens que rien ne me prédestinait à rencontrer, je passe et subvertis les frontières, je ne me laisse que rarement aller au découragement, j’élabore des tracés de fictions, j’invente des mondes, je crée de l’espace pour la jubilation, j’ose parier que le rêve qui m’anime lorsque je conçois un projet sera transmissible universellement, je ne cesse d’apprendre, je tisse des ponts, je crée des formes, je suis artiste, je travaille patiemment, j’œuvre pour l’humanité entière.

Dans ce monde-ci, je rends une carte de couleur bleue à lafin de chaque mois qui me fait entrer dans l’étatique catégorie« Chômeur ».

Maisnon, je ne suis pas une chômeuse. Je ne chôme pas. Je travaille tous les jours. Patiemment, avec endurance, persévérance, joie et désintéressement. Je me lèveà 7h00, me met au travail dès 9h00, ne compte pas les heures, travaille souvent tard dans la nuit, me relève le matin, œuvrant, comme la chose la plusprécieuse au monde, à défendre ma fraicheur. Je travaille le plus souvent sans soutien, sans garantie, sans arrières, sans nul autre aiguillon que la persévérance têtue et fragile d’un désir que l’obstination un jour peut être transformera en œuvre transmissible et tangible.
Je ne suis donc pas « chômeuse ».

C’est le nom que l’Etat me donne.

Ce n’est pas le nom que je me donne.

Non, je ne suis pas non plus « responsable de ma situation », de « mon inadaptabilité », ou de « ma mauvaise foi ». Je suis créatrice d’emplois. Du travail, l’Etat n’en crée pas pour moi. Moi, j’en crée pour d’autres. Les innombrables projets dont je suis à l’initiative créent cesemplois qui font si cruellement défaut.

Plutôtque de me stigmatiser, l’Etat se doit donc me remercier.

Non,je ne profite pas des dérives de l’ « assistanat ». Les indemnités que l’Etat me verse sont celles pour lesquelles je cotise. Elles sont par ailleurs misérables. Pour tout le travail effectué sans compter, jegagne au mieux 46 Euros 23 cent par jour.

Non,je ne « profite donc pas des dérives de l’assistanat », je travaille juste beaucoup pour très peu. Non, je ne vous coute rien. Je travaille sans compterpour offrir à ce monde la part d’imaginaire sans laquelle il irait tout droit àla mort.

Non,je ne suis pas une fraudeuse. Il est vrai que souvent je ne paie pas le bus enfin de mois, que je fais les poubelles du Champion, que mes chaussettes sont trouées, que je connais bien les huissiers. Non, je ne suis pas une fraudeuse, car si j’en suis une, c’est que alors je n’ai aucun mérite et que je suis« en trop ». Fraudeuse, je deviens alors la cible qui permet à l’Etat d’afficher sa vertu.
Or je ne fraude pas, je suis juste pauvre.

« Chômeuse »,« inadaptée », « profiteuse », « fraudeuse », je bannirai tous ces noms.

Je dirais juste ce soir que je suis une espèce en voie de disparition.

300 personnes, 300 artistes ont déjà depuis un an perdu ou vu amputés une partie de leur droit à une libre existence et à la libre création.

Et cela continue et cela continuera.

Je ne me tairai donc pas,

Céline Rallet,
Octobre 2012


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