J’ai un soucis avec le ton et l’approche dans l’article sur l’action du camarade russe, ça m’a mit grave mal à l’aise. Au risque de passer pour un rabat joie, j’ai deux trois trucs à dire.

Déjà, je pense qu’on peut parler d’action suicidaire. Avec son message pré-mortem, Mikhail confirme qu’il envisage la mort comme certaine.

Sans juger le choix du camarade russe, on pourrait peut-être en parler de manière moins prophétique. Je peux comprendre (même sans y adhérer) la fascination chronique pour la spontanéité individuelle sous forme de prose passionnée et transcendante. Mais là...

##############des phrases qui me fouttent l’angoisse################

« Une attaque vengeresse qu’il a payé de sa vie." > moi j’y vois plutôt un suicide voulu comme destructeur pour des opposants

« Mikhail Zhlobitsky a décidé de rendre coup pour coup. » > mmmh un peu exagéré non ?

« En Russie, un anarchiste s’est mis face à face avec l’ennemi assassin et tortionnaire." > comment c’est formuler, ça invisibilise les actions des militant.e.s russes (entre autres listées dans l’article), comme si l’action suicidaire était LE « face à face » ultime

« En Russie, quelqu’un a sacrifié sa vie pour que la voie vers la liberté de toutes et tous, la voie vers l’avenir radieux du communisme anarchiste reste ouverte à d’autres. » > propagande sectaire flippante

« Nous ne pouvons qu’accueillir le geste de Mikhail Zhlobitsky comme un appel, comme une incitation, comme un encouragement à poursuivre contre vents et marées sur les sentiers d’un anarchisme de combat qui ne remise pas ses perspectives au fond des poches. » > propagande sectaire flippante bis

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Pour contrebalancer un peu l’euphorie

Cette action suicidaire n’a fait aucunes victimes du côté des oppresseurs, à part la centaine de camarades convoqué.e.s par le fsb, dans un contexte ou leur milieu subissait déjà un répression qu’on peine à imaginer dans nos contrées. Sans condamner l’acte en lui même, sans penser que ce soit mal ou bien, je ne peux m’empêcher de penser que le camarade a une responsabilité dans la vague de répression qui intervient dans le sillon de sa mort. Et je doute fort que l’entièreté de la mouvance concernée par cette répression n’ai de critique constructive à porter dans cette affaire.

(Après je saaaaaais qu’en général, pour les personnes se revendiquant « anarchistes insurectionalistes/indivualistes » et puis même d’autres, on s’en tape des autres, la révolution ça s’attend pas, c’est au quotidien blabla. De mon côté, je suis peut être naïf ou trop inexpérimenté, mais je suis encore persuadé qu’on puisse agir de manière efficace contre ce monde de merde sans être dans l’attentisme, et surtout sans en faire payer le prix au collectif d’un côté quand de l’autre on revendique une approche politique affinitaire et/ou individualiste.)

Le suicide, c’est cool ou c’est pas cool ?

Personnellement, je pense que ça dépend du contexte et que personne en dehors des proches du/de la suicidée ne peut se prononcer sur la question. Par contre si il y a une chose dont je suis convaincu c’est que le seul contexte politique (ici fasciste) ne peut pas légitimer un suicide.

(En Turquie, les attentats suicides revendiqués par des groupes révolutionnaires (de type marxistes léninistes) c’est pas anodin. Il paraîtrait que ce sont pour la plupart des militant.e.s en phase terminale de maladie incurable. Par exemple : https://www.la-croix.com/Monde/Turquie-11-policiers-tues-dans-attentat-suicide-PKK-2016-08-26-1300784653)

Quand je réfléchis à tout ça, je me dis que j’ai bof envie que mes camarades aux tendances suicidaires (tendances que je peux partager de temps à autre) aillent se faire péter dans des comicos VIP le jour où on vivra dans un régime fasciste du level poutinien (en vrai ça ne saurait tarder). Si ça devait arriver à un.e de mes proche, je serais solidaire, je pleurerai mon ami.e et j’aurai encore plus la rage contre ce monde, mais je ne saurais voire autre chose qu’un suicide un peu plus funky qu’un autre.

Je trouverai ça triste que l’attentat suicide devienne un type d’action directe anarchiste comme un autre. Et faire l’apologie d’une action de ce type sans prendre plus de recul, c’est amorcer une banalisation du suicide comme mode d’action. Dans une époque ou les jeunes générations militantes sont de fait dépressives et désabusées (par entre autre le sentiment d’impuissance face à la dureté de la surveillance et la répression) je trouve ça inconscient et dangereux même.

Voilà, bisous.