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CALAIS – EXPULSIONS – AVRIL 2015 : ÉLÉMENTS DE CONTEXTE

1999 : augmentation du nombre de réfugié-e-s à Calais. Ouverture du « Centre d’hébergement et d’accueil humanitaire » dans un hangar à l’écart de la ville, sur le territoire de la commune de Sangatte. Ce hangar accueillera jusqu’à 2000 personnes.

2002 : fermeture du centre de Sangatte par Nicolas Sarkozy, ministre de l’intérieur. Cette fermeture était sensée régler la question de la présence des exilé-e-s à Calais. 13 ans plus tard, ils et elles sont toujours là.

Depuis fin 2002 : les exilé-e-s n’ont plus de lieu à Calais où ils et elles aient le droit d’être. Ils et elles habitent dans tout ce qui peut leur servir d’abri ou construisent eux-même des campements, dont ils et elles sont expulsé-e-s et qui sont détruits. Ils et elles connaissent des contrôles au faciès dans la ville, et les violences policières sont quotidiennes.

Où (s’)hab(r)iter ? Des solutions de survie à l’autoconstruction.

Dès la fermeture de Sangatte, les exilé-e-s ont dû trouver des lieux où s’abriter, souvent d’une extrême précarité : blockhaus, tuyaux de chantiers, anciennes portes d’écluses, bâtiments abandonnés, terrains vagues… S’ils et elles ne sont pas expulsé-e-s rapidement, une vie collective se met en place et les exilé-e-s aménagent leurs espaces de vie pour répondre à leurs besoins sociaux ou spirituels autant que de survie. C’est cette auto-organisation qui est détruite lors des expulsions qui enlèvent aux exilé-e-s les moyens de répondre par eux-mêmes à leurs besoins.

2003 : traité du Touquet organisant les contrôles à la frontière franco-britannique, et notamment les contrôles britanniques dans les ports français.

2009 : forte augmentation, jusqu’en juillet, du nombre d’exilé-e-s, principalement afghan-e-s, présents à Calais. La plupart des squats et campements sont évacués et détruits en septembre et octobre, de manière très médiatisée (« fermeture de la Jungle de Calais » le 22 septembre par Éric Besson, ministre de l’immigration et de l’identité nationale).

2009 : signature d’un nouvel arrangement franco-britannique portant sur la répartition des coûts de sécurisation du port, le contrôle de la frontière et la répression à ses approches.

Depuis l’automne 2013 : augmentation graduelle du nombre d’exilé-e-s à Calais, reflet atténué de l’augmentation du nombre de personnes traversant la Méditerranée (200 000 exilé-e-s arrivent en Italie en 2014, ils et elles sont au maximum 3000 à Calais).

2014 : année meurtrière à la frontière

Avec au moins 17 personnes décédées de part et d’autres de la frontière, 2014 a été l’année la plus meurtrière depuis la fermeture de Sangatte. En raison de la difficulté du passage, les exilés prennent de plus en plus de risques pour tenter de rejoindre le Royaume-Uni, les tensions s’exacerbent. La précarité des conditions de vie use les personnes moralement et physiquement, et peut entraîner la mort.

La réponse des autorités à cette augmentation se fait en trois temps :
- tout d’abord la poursuite du harcèlement policier et des expulsions de squats et campements selon leur rythme ordinaire, sans réelle anticipation de ce qui est en train de se passer ;
- l’expulsion de trois campements situés près du centre de Calais le 28 mai 2014. Une partie des exilé-e-s part à la périphérie de Calais, où le préfet les a invité à squatter de nouveaux terrains. Les autres occupent en protestation le lieu aménagé pour la distribution des repas, près du centre-ville. Le lieu de distribution des repas et trois squats de centre-ville sont évacués le 2 juillet de manière particulièrement violente (600 arrestations, 200 placements en rétention). La plupart des exilé-e-s vont à la périphérie dans les campements actuels. Les associations et No Border ouvrent un grand squat en centre-ville le 12 juillet.
- les autorités décident de regrouper un certain nombre de services aux exilé-e-s à l’écart de la ville, au-delà de la rocade autoroutière (camp Jules Ferry), et de regrouper les exilé-e-s sur le site d’une ancienne décharge situé à proximité.

Les violences policières : une réalité quotidienne.

Le harcèlement policier est un aspect important de la politique qui vise à dissuader les exilé-e-s de rester à proximité de la frontière, il a été dénoncé au fil des années par une série de rapports dont notamment :

2008 : rapport de la Coordination nationale pour le Droit d’asile – le titre du rapport était « la loi des jungles »
2012 : décision du Défenseur des droits concernant le harcèlement policier à Calais.
Début 2015 : rapport de l’ONG « Human Right Watch » sur les violences policières à Calais / long développement concernant Calais dans le rapport du Commissaire aux Droits de l’Homme du Conseil de l’Europe sur la situation des Droits de l’Homme en France / nouvelle saisine du Défenseur des Droits sur le harcèlement policier à Calais.

Septembre 2014 : annonce par la mairie et le gouvernement de l’ouverture d’un centre de jour pour les migrant-e-s, réunissant en fait des services déjà existants. De manière officieuse, les autorités font savoir aux associations que les exilé-e-s devront s’installer uniquement autour du centre de jour, dans une zone tolérée.

Septembre 2014 : nouvel accord franco-britannique, prévoyant la création d’un fonds commun pour la sécurisation du port et le renforcement de la politique répressive conjointe et au niveau européen.

Janvier 2015 : fin des distributions de repas aux exilé-e-s en centre-ville, début des distributions de repas au camp Jules Ferry.

Mars 2015 : ultimatum des autorités aux exilé-e-s. Ils et elles ont jusqu’au 31 mars pour « déménager » de leur plein gré sur l’ancienne décharge près du camp Jules Ferry, sinon ils et elles seront expulsé-e-s par la police.

Un centre sans accueil.

Le centre Jules Ferry vise davantage à éloigner les exilé-e-s de la ville plutôt qu’à les accueillir :
- c’est un dispositif regroupant un certain nombre de services existants où il n’y a aucun endroit prévu pour s’asseoir, pour se reposer, pour la convivialité.
- il est éloigné du centre de Calais.
- il n’y a pas d’hébergement pour les hommes.
- un seul repas est fournit par jour alors qu’il n’y a aucun commerce à proximité.
- sa capacité est limitée à 1000 personnes.

Le nouveau bidonville.

Le terrain où les autorités imposent aux exilé-e-s de s’installer :
- est en lui-même inhabitable : dépôts de déchets sauvages / remblais d’origine douteuse / terrain humide
- n’est équipé d’aucune infrastructures : pas d’éclairage / pas d’eau / pas de toilettes / pas de poubelles.
- est dangereux car à proximité de la zone d’influence des passeurs (risques de prise de pouvoir, extorsion de fonds, violences), et en raison des conflits avec les chasseurs et motards qui utilisent ce site actuellement, ainsi qu’avec les riverains.
- est éloigné du centre de Calais, et donc du reste de la population, des services proposés par les associations, des magasins, des services administratifs (OFI, poste, sous-préfecture...)…
- n’a fait l’objet d’aucun écrit officiel autorisant les migrant-e-s à s’y installer et peut être évacué au gré des décisions des autorités.

Les femmes déplacées à nouveau.

La maison des femmes avait été ouverte en 2013 par les No Borders près du centre-ville, la préfecture a ensuite demandée à ce qu’elle soit reprise par une association d’insertion (Solid’R). Les femmes ont été déménagées en juillet 2012 dans un préfabriqué à l’écart de la ville. Elles ont été à nouveau déménagée le 26 mars 2015 au centre de jour Jules Ferry, dans un autre préfabriqué, à l’écart de la ville, dans une zone où elles seront plus vulnérables lors de leurs déplacements.

Première quinzaine d’avril : période prévue pour l’expulsion des squats et des campements. Une visite du ministre de l’intérieur Bernard Cazeneuve, est annoncée.

11 avril 2015 : ouverture complète du camp Jules ferry, à environ 6 km du centre-ville.

De Sangatte à Jules Ferry

13 ans après la fermeture de Sangatte, les autorités tentent à nouveau de regrouper les exilé-e-s à l’écart de la ville. Cette création se fait par la destruction des lieux de vie existants et une aggravation de la pression policière. Si des services sont regroupés comme à Sangatte, il n’y a plus de hangar pour abriter les personnes, celui-ci est remplacé par un bidonville. Cette démarche de relégation est présenté par le gouvernement comme une solution humanitaire.


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