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Catastrophe ferroviaire au Canada

posté le 20/07/13 par PCInt Mots-clés  luttes sociales  luttes environnementales 

Catastrophe ferroviaire de Lac-Mégantic : le criminel est la loi du profit !

Le bilan de la pire catastrophe ferroviaire au Canada depuis des décennies se monte à au moins 50 morts, beaucoup de victimes n’ayant même pas été retrouvées. Le samedi 6 juillet à une heure du matin un train transportant du pétrole brut a déraillé dans la petite ville de Lac-Mégantic au Québec (6000 habitants) ; l’incendie et l’explosion de plusieurs wagons a détruit une grande partie du centre ville.

Le train s’était arrêté 11 km avant, en haut d’un côté, pour un « changement d’équipe » : en fait d’ « équipe » ce convoi de près de 2 kilomètres de long venant du Dakota, qui avait traversé les grandes agglomérations de Toronto et Montreal et qui comprenait 5 locomotives et 72 wagons de plus de cent tonnes, était dirigé par un seul conducteur ! Ce dernier, qui venait d’effectuer 12 heures de travail d’affilée, est allé se reposer après avoir actionné le système de frein, selon la réglementation habituelle. Mais à la suite d’une intervention de pompiers pour éteindre un incendie, le train s’est mis en mouvement et, sans conducteur, il a dévalé la pente jusqu’à Lac-Mégantic.

Le directeur de la compagnie ferroviaire Montreal, Maine and Atlantic Raiway (MMA) a mis à pied le conducteur, l’accusant d’être responsable de l’accident ; selon lui il aurait menti en affirmant avoir correctement actionné les freins du convoi (et la compagnie a profité de l’accident pour licencier le 16 juillet 19 autres employés au Québec).
Mais accuser le conducteur sert en réalité à cacher la responsabilité directe de la course au profit qui est la règle dans la société capitaliste et qui se mène toujours au détriment des travailleurs et de la sécurité.

MMA (anciennement Iron World Railways) a été rachetée en 2003 par Rail World Inc., une société appartenant au capitaliste américain Burkhard qui a bâti sa fortune en achetant et vendant des entreprises ferroviaires. Dans les années 90 il avait participé à la privatisation des chemins de fer en Nouvelle Zélande, ce qui lui a valu, en signe de reconnaissance de la part des bourgeois néo-zélandais, le titre de « consul honoraire » de ce pays ! Toujours dans les années 90 il a profité de la privatisation des chemins de fer en Grande-Bretagne pour constituer la plus grande compagnie de transport ferroviaire de marchandises (aujourd’hui vendue à une entreprise allemande), supprimant au passage 1700 emplois ; il participé à la fructueuse privatisation des chemins de fer en Estonie en 2001 (le gouvernement local a été obligé quelques années pus tard de racheter les chemins de fer), il fait partie du conseil d’administration d’une entreprise privée de chemins de fer polonaise et d’autres aux Etats-Unis.

Pour ses succès dans la rentabilisation des entreprises par la réduction des coûts et l’accroissement de l’exploitation des travailleurs, Burkhard a été nommé en 1999 « cheminot de l’année » par la revue patronale Railway Age, puis l’un des 16 « plus grands cheminots du Vingtième siècle ». Mais selon les statistiques de l’American Federal Railroad Administration, entre 2003 et 2011, MMA avait un taux d’accident double ou triple que le taux moyen dans ce secteur : le profit se fait toujours sur le dos des travailleurs et de la population…

Peu après le rachat de l’entreprise canadienne, Burkhard baissa les salaires de 40%, sous le prétexte de la faillite d’un gros client. En 2010 il annonça un plan d’économies de 4,5 millions de dollars en diminuant le nombre de travailleurs par locomotives. En 2012 Transport Canada, l’agence gouvernementale régulant les chemins de fer, a autorisé MMA a opérer les trains avec un seul conducteur . Ce brutal accroissement de la charge de travail des conducteurs a été accompli dans l’indifférence voire avec l’accord explicite des syndicats du secteur
L’Etat bourgeois qui, selon les démocrates et les réformistes, devrait avoir pour rôle de protéger et défendre « tous les citoyens », en réalité est au service du capitalisme et des capitalistes.

Depuis de nombreuses années les différents gouvernements ont multiplié les décisions en faveur des entreprises ferroviaires : si aujourd’hui dans la plupart des trains de marchandises aujourd’hui la norme aux Etats Unis comme au Canada est que les équipes se composent de deux travailleurs, elles en comportaient cinq il y a une trentaine d’années. La course à la productivité qui existe dans ce secteur aussi, a fait que les prolétaires sont toujours moins nombreux pour produire toujours plus ; et quand les diverses réglementations édictées pour assurer la sécurité deviennent des obstacles à la réalisation des profits, elles sont supprimées.

A la demande des capitalistes, en 1999 un gouvernement libéral décidait d’accélérer la déréglementation, une politique poursuivie par tous les gouvernement successifs. Une des mesures obtenues par les compagnies a été « l’autoréglementation » : ce sont les compagnies elles-mêmes qui décident des mesures de sécurité à prendre !
Le résultat était prévisible : en 2007 le Conseil Canadien de la Sécurité publiait un rapport constatant la dégradation de la sécurité dans les chemins de fer. Depuis 1991 il était établi aux Etats-Unis que les wagons utilisés ne sont pas sûrs ; en 2011 le gouvernement canadien finissait par exiger que les compagnies n’en achètent plus lors du renouvellement de leur flotte, tout en autorisant l’utilisation de ceux existants : mais comme la durée de vie de ces wagons est de trente à cinquante ans, ils vont encore circuler pendant des décennies ! Les investissements dans les infrastructures ferroviaires sont très insuffisants, etc. Alors que par ailleurs le boom du transport du pétrole brut dope les profits des compagnies ferroviaires (le transport du pétrole par train est moins coûteux que par oléoduc)…

La catastrophe de Lac-Mégantic n’est donc absolument pas due au hasard, à la fatalité : c’est un crime commis par l’entreprise MMA, par le capitalisme, par la course au profit qui anime toutes les entreprises dans cette société avec l’aide de l’Etat : l’année dernière l’Etat cassait la grève des travailleurs de la Canadian Pacific Rail ; des milliers de travailleurs ont été mis à pied, les conditions de travail des autres se sont dégradées, les dépenses « improductives » pour la sécurité et l’entretien ont été réduites, pour le plus grand profit de l’entreprise. Le sanglant capitaliste Burkhard n’est pas une exception, il est le produit du mode de production capitaliste.

Contre de telles catastrophes, il est stupide de rêver au retour à un passé mythique d’un capitalisme « réglementé » qui remplacerait le sauvage capitalisme « néo-libéral » actuel : le capitalisme hier était tout aussi sauvage qu’aujourd’hui, il méprisait tout autant la sécurité et la vie des travailleurs et de la population et pendant tout le siècle dernier la devise des entreprises ferroviaires a été toujours la même : Uphill Slow, Downhill Fast, Tonnage first, Safety Last ( lentement à la montée, vite dans la descente, le tonnage en premier, la sécurité en dernier) !

C’est le capitalisme qui est criminel, c’est lui qu’il faut combattre et mettre à mort pour pouvoir vivre en sécurité !

Parti Communiste International

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