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Entrevue : Un wobbly de Montréal au Rojava

posté le 28/12/16 par dure réalité Mots-clés  antifa 

Alors qu’on entend beaucoup parlé de la guerre en Syrie et en Irak depuis quelques années dans les médias et plus particulièrement, dans les derniers jours, de la reprise de la ville d’Alep par le régime de Bachar el-Assad, Dure Réalité a cru bon remettre quelques pendules à l’heure en interviewant un montréalais qui a décidé de mettre l’épaule à la roue au Kurdistan syrien. Syndicaliste révolutionnaire, membre de l’IWW-Montréal, anarchiste et antifasciste de longue date, G. a décidé d’aller soutenir concrètement la révolution kurde au Rojava.

Sur place, nombreux sont les belligérants : Le gouvernement syrien, les groupes rebelles, l’État islamique, le gouvernement irakien, la Turquie, la Russie, l’Iran, l’Europe, les États-Unis et même le Canada essaient de tirer la couverte de leur bord. Dans ce chaos, un groupe tire son épingle du jeu, il s’agit des Kurdes du Rojava qui ont décidé de s’organiser autrement et de faire émerger une révolution sociale, basée sur des idées communistes et anarchistes, à partir du chaos ambiant. Entrevue de fond sur le thème de la révolution kurde

Salut ! Qu’est-ce qui t’a poussé à quitter tout, emploi, appartement, métier pour aller combattre aux côtés des YPG (Unités de protection du peuple) ?

J’ai tout quitté principalement pour la révolution en cours la bas. Combattre DAECH (État islamique) est important, mais ce n’est pas ma principale motivation. La révolution que les Kurdes ont débutée est basée principalement sur trois principes : le féminisme, la démocratie directe et l’écologie. C’est effectivement une révolution anarchiste. On peut comparer cela a la Révolution espagnole de 1936, mais dans un contexte bien plus complexe, avec les différents fronts et les alliances qui changent constamment. Je suis anarchiste depuis plus de 10 ans et je me suis toujours dit que si j’avais vécu en 1936, j’aurais été combattre en Espagne, c’était donc naturel pour moi de venir au Rojava et joindre les YPG/J.

Comment as-tu organisé ton départ ?

J’ai commencé par m’informer le plus possible pour être certain de mon choix. Une fois décidé, j’ai travaillé sans prendre de vacances pendant environ un an et demi pour avoir l’esprit tranquille là-bas. J’avais en effet des dettes d’études a régler et j’avais évidemment besoin d’argent pour me rendre jusqu’ici. C’est à nos frais et nous sommes bénévoles ici. Je me suis aussi renseigné sur les conséquences possibles. Finalement, pour un Canadien, c’est entièrement légal, tant qu’on respecte la Convention de Genève (on pourrait dire que c’est la loi sur les guerres pour les pays signataires). J’ai aussi dû avisé la GRC pour être certain de ne pas être pris à tort pour un combattant de DAECH. La partie la plus difficile a été de contacter une organisation pouvant me faire rentrer au Rojava, ce qui m’a pris plusieurs mois. J’ai finalement contacté le YPG International qui était nouveau et à partir de là, c’a été simple et très rapide, moins de 3 semaines. En plus de ces démarches, j’ai étudié un peu la langue kurde (kurmanji), je me suis entraîné physiquement et j’ai préparé mes papiers légaux. Je devais m’assurer que quelqu’un puisse s’occuper de la paperasse normale… Impôts, correspondances, etc. Je voulais tout laisser en ordre au Canada pour avoir l’esprit tranquille ici et ne pas avoir pleins de trucs à régler dès mon retour. Si c’était à refaire, j’ajouterais l’achat de trucs divers et peu encombrants : lunettes de visée, kit de couture pour réparer mon matériel, kit de nettoyage de fusil, bon couteau, gants, trousse médicale militaire et de survie, etc.

Le Kurdistan, c’est quoi exactement ? C’est quoi ça, YPG/YPJ ?

Le Kurdistan est la région où, historiquement, il y a beaucoup de Kurdes, mais pas que. Elle est divisée entre 4 sous-régions : Kurdistan turque, irakien, iranien et syrien (respectivement Bakûr, Basûr, Rojilat et Rojava pour nord, sud, est et ouest). Seule la partie irakienne a une reconnaissance, donc une autonomie politique. Je ne connais pas trop la situation en Iran, mais c’est actuellement la guerre entre les Kurdes et le gouvernement. En Irak, les peshmerga sont alliés, faute de choix, au gouvernement contre DAECH. En Turquie, le PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan) est en guerre contre le gouvernement depuis une trentaine d’années. Ils sont aussi opposés à DAECH alors que la Turquie a grandement aidé l’État islamique. Et Rojava, Kurdistan syrien. Les relation entre les YPG/J et le gouvernement de Bachar el-Assad sont tendus, mais généralement, ils ne combattent pas un contre l’autre. Je dis bien généralement, ça arrive et c’est pas toujours doux. Pour l’instant, le gouvernement a surtout subit de cuisantes défaites. Je n’aborderai pas plus l’histoire du Kurdistan car celle-ci est très complexe.

Les YPG/YPJ, ce sont les Unités de protection du peuple / des femmes. En kurde : Yekîneyên Parastina Gel/Jin. Elles ont été créée en 2004, dans la clandestinité, suite à un massacre par le régime d’el-Assad, qui est aussi l’un des différents protagonistes ici. Leur création avait pour but d’assurer la défense des Kurdes en Syrie en cas de nécessité, comme cela a souvent été le cas. Finalement, lorsque DAECH a commencé à envahir le territoire kurde et que le régime s’est sauvé de ces zones en leur laissant le champ libre, elles sont sorties de la clandestinité et ont commencé à combattre les djihadistes de l’État islamique. La première réelle défaite de DAECH fut imposée principalement par les YPG/J à Kobané, c’est ce qui a permis de détruire le mythe d’invincibilité qui entourait le groupe djihadiste et de stopper son avance un peu partout en montrant qu’il était possible de les vaincre, même avec une armée irrégulière. Le siège de Kobané a été un combat acharné de 3 mois. Au final, il ne restait que 150 mètres de terrain et environ 150 combattants/combattantes lorsque DAECH a commencé à reculer. Cette victoire a tout changé, aujourd’hui DAECH ne serait assurément pas à la veille de la défaite si ce n’était pas des YPG/J. Actuellement, c’est la principale armée du Rojava, l’armée révolutionnaire. Elle est l’instigatrice et membre principale des FDS (Forces démocratiques syriennes), un regroupement de forces locales pour défendre la révolution syrienne.

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