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Glissement des pays du Golfe vers Israël

posté le 13/12/17 Mots-clés  antifa 

Malgré leur condamnation de la décision de Donald Trump de reconnaitre Jérusalem comme capitale d’Israël, plusieurs pays du Golfe, en premier lieu l’Arabie saoudite et Bahreïn, ont ouvert des canaux de dialogue avec Israël. Il s’agirait de faire face à « la menace iranienne ». Reste à savoir si leurs sociétés sont prêtes à accepter le bradage de la question palestinienne.

« Nous entretenons des relations, en partie secrètes, avec des pays islamiques et arabes. D’une façon générale, ce n’est pas quelque chose qui nous gêne, et c’est plutôt l’autre partie qui tient à garder le secret. Mais si nous n’avons d’ordinaire aucun problème en ce qui nous concerne, nous respectons le souhait de l’autre partie lorsque ces relations prennent une certaine dimension, que ce soit avec l’Arabie saoudite ou avec d’autres pays arabes ou islamiques. Certaines de ces relations sont très avancées, mais nous les tenons secrètes. » La déclaration en novembre 2017 du ministre israélien de l’énergie Yuval Steinitz à la radio de l’armée israélienne sur l’établissement de contacts secrets entre Israël et l’Arabie saoudite qui seraient également préoccupés par le voisin iranien n’ont suscité aucun commentaire officiel des États du Golfe.

C’est la première fois qu’un responsable israélien fait état de tels contacts. Dans une intervention sur Radio Monte-Carlo Doualiya depuis Washington, où il vit en exil, le journaliste saoudien en exil Jamel Khashoggi, figure des médias du royaume, n’hésite pas à parler d’une « erreur stratégique de la part de Riyad » et déplore « cette précipitation sur une question à laquelle elle n’a rien à gagner. »

PROTESTATIONS SUR LES RÉSEAUX SOCIAUX

Les utilisateurs des réseaux sociaux se sont aussi émus de la récente visite privée en Arabie saoudite du blogueur israélien Ben Tzion, qui a publié sur sa page Facebook une vidéo tournée à l’intérieur de la mosquée du prophète Muhammad à Médine avec le commentaire suivant : « La prière pour la paix ! Côte à côte avec mes frères arabes. Pour la paix pour tous dans tout le Proche-Orient. Pour la paix entre juifs, musulmans, chrétiens, coptes, druzes, Bédouins et tous les descendants d’Ibrahim-Abraham. Salam, Chalom. » Largement partagée, cette vidéo a suscité l’indignation d’internautes se demandant comment le blogueur était entré en Arabie saoudite et avait été autorisé à pénétrer dans la mosquée et formulant de vives critiques contre Riyad, accusé de normaliser les relations avec Israël.

Au mois de novembre, un pilote israélien avait participé à une course automobile sur le circuit international de Manama — sans toutefois mettre le drapeau d’Israël sur son véhicule, les organisateurs ne tenant pas à provoquer l’opinion publique —, tandis que le Qatar accueillait des représentants d’Israël à un colloque sur le « renforcement des perspectives économiques au Proche-Orient. » Dans les deux cas, une vague de condamnations a déferlé sur les réseaux sociaux et les accusations de normalisation ont fusé contre le Qatar et Bahreïn.

Ces événements n’ont en revanche fait l’objet d’aucune réaction officielle dans le Golfe, où les autorités restent indifférentes aux reproches qui leur sont faits de pactiser avec l’ennemi. De son côté, la machine médiatique — officielle ou non — est tout occupée à disserter sur le péril que représentent l’expansionnisme et le nucléaire iraniens. « Au moment de la création de l’État d’Israël en 1948, il n’existait pas d’État appelé Palestine. Ils n’ont jamais existé, il n’y avait que des communautés éparses (…) de Cananéens, d’Amalécites ou de Jabbarines. Il n’y a donc pas d’État du nom de Palestine », a affirmé le journaliste Abdellah Al-Hadlaq sur la chaîne koweitienne Al-Raï. De même, sur la chaîne israélienne Channel 10, le journaliste bahreïni Abdellah Al-Jounaid a affirmé que l’Iran constituait une menace aussi bien pour le Golfe que pour Israël. « Le voyage du président Trump entre Riyad et Tel-Aviv est un événement historique », a-t-il ajouté.

Cette reconnaissance est un fait nouveau dans une région connue pour son hostilité à Israël et où le fait d’accepter son existence et de coopérer avec lui était jusqu’ici absolument impensable.

Ces sorties inhabituelles, tentative explicite de faire évoluer l’opinion régionale sur ce sujet sensible entraient en résonance avec un tweet publié par le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou le 21 novembre sur son compte en langue arabe : « Le principal obstacle à la paix ne vient pas des dirigeants des pays qui nous entourent, mais de l’opinion publique arabe soumise depuis tant d’années à une propagande présentant Israël de façon fausse et tendancieuse. »

« Les pays du Golfe et l’Arabie saoudite en particulier sont en train de préparer les esprits à la normalisation avec Israël et font appel pour cela à certains écrivains et analystes », a rétorqué Jamel Khashoggi. « Les sionistes s’emploient à créer un climat de réconciliation et de normalisation avec les pays du Golfe arabe mais nous ne sommes pas disposés à reconnaître au voleur le droit de s’emparer de la maison de nos frères » (allusion à la Palestine), a déclaré pour sa part le docteur Dhafer Al-Ajmi, directeur exécutif du Gulf Monitoring Group, lors de l’émission de radio Saa khalijia.

Au lendemain de la conférence de paix organisée à Madrid en 1996, le Qatar et Oman avaient bien autorisé l’ouverture d’entreprises commerciales israéliennes, mais elles avaient été fermés dans les années 2000. De nombreux produits fabriqués en Israël n’en continuent pas moins d’arriver dans les pays du Golfe et lorsque les citoyens s’en émeuvent, les autorités font retirer la marchandise… quand elles n’ignorent pas purement et simplement les dénonciations.

Ce rapprochement officiel a ouvert la voie aux partisans de la normalisation et l’idée qu’Israël puisse devenir un partenaire, voire un allié, fait son chemin dans certains esprits — d’autant que les pays du Golfe ont baissé le ton envers l’État israélien pour se concentrer sur le péril iranien (ou péril « perse » ou encore « safavide », comme on l’entend parfois).


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