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L’irraison d’Etat

posté le 07/02/21 par Philippe Delgleize Mots-clés  répression / contrôle social 

L’Irraison d’Etat

Comme vous peut-être, je suis depuis plus d’un an traversé par de multiples émotions contradictoires, écartelé entre l’envie de faire corps, œuvre de citoyen devant la raison sanitaire et perturbé par non seulement la peau de chagrin qu’il nous reste à vivre mais de surcroît seul et dans l’épouvante des autres…

Tout cela n’est supportable que dans la mesure où le mot « crise », et c’est ce que chiffres et statistiques au jour le jour entretiennent comme espoir, est un « mauvais moment » à passer. La projection d’une bonne bière entre amis dans un chalet de Noël 2021 suffirait presque à nous faire ronger notre frein encore un peu. Et cela égoïstement bien sûr, en évitant du regard les vitrines éteintes, les stades vides, les tatoueurs en berne, les SDF transis, les infirmiers exténués, les jeunes en déroute et les rues qui ne rigolent plus, même dans leurs masques !

Certes le politique n’y est pour rien, ce n’est pas lui qui a créé la pandémie, et je tiens pour « sincères » tous nos élus qui ont défilé pour nous dire la mort dans l’âme qu’ils étaient « désolés » et que si ça ne dépendait que d’eux ils réveillonneraient avec papa maman, grand frère et Joséphine… Ce n’est pas de gaité de cœur qu’ils ont restreint notre liberté et pratiqué une langue nouvelle, parsemée de bulles, de gel, de barrières, de distances et de funérailles express. Si l’imprévoyance ou le cynisme de certains a largement contribué à appauvrir la santé après l’avoir fait avec l’enseignement, ils ne l’ont pas fait en connaissance de cause ni à dessein. Ils étaient tout simplement gagnés comme la plupart d’entre eux et malheureusement d’entre nous au credo de l’essentielle croissance économique. Le fuel a fini par l’emporter sur la destination. L’Economie dirige et l’Etat fait figure de pilote automatique…

Cette dite crise fait suite à la pétrolière de 73, au krash de 29, 87, 08 (comme un numéro d’urgence), aux crises animalières, où les vaches deviennent folles, les poulets stériles et les sangliers africains. Les glaciers fondent, les océans se soulèvent, l’air stagne et le désert avance. Là aussi ils vous diront que ce n’est pas de leur ressort, qu’ils sont impuissants à infléchir l’ordre du monde.

Mais quelle est donc cette crise qui n’en finit pas ?... Pas besoin d’imaginer un complot. Il est dans la dénégation même de la fonction politique. Dans le renoncement à changer un paradigme sociétal qui écrase plus de 80% des humains et des ressources. Dans cet aveu d’impuissance et de soumission à une fatalité économique l’échine se plie à la courbe de croissance et comptabilise ses morts.

Plutôt que de profiter de cette ixième crise pour remettre le moule en question, pour cesser la déprédation, l’expérimentation folle, la consommation à outrance, les apprentis sorciers, ministre de l’intérieur et ministre de la santé, nous concoctent un projet de loi « pandémie » qui vise à entériner l’état de crise, en se donnant les « pouvoirs spéciaux » avant l’heure. De sorte que quand ils martèlent « leur plus jamais ça », leur ambition n’est pas de tout faire pour éradiquer les pandémies mais de s’armer un peu mieux pour la prochaine. Au même moment la « loi sur la sécurité globale » en France renforce les prérogatives policières (interdiction de les filmer, port de l’arme autorisée hors-service) et propose de légaliser les nouveaux moyens de surveillance à partir des drones, de la reconnaissance faciale, thermique et que sais-je encore…

Gouverner c’est prévoir certes. Mais prévoir quoi ?... Elus, experts et penseurs nous assurent de leur « bonne gouvernance » et de leur « bienveillance » mais sans pouvoir dire à tous nos jeunes vers quoi nous allons. On s’étonnera dès lors qu’un bon nombre ne rêvent plus et ne s’adonnent qu’au plaisir en ligne. Pour cause aujourd’hui tout est dans la réaction et plus rien dans l’action. Les seules alternatives au désastre viennent de la société civile. Calquée sur le management, la politique enfante alors des monstres confinés dans leur quant-à-soi, comme ce fut le cas récemment aux Etats-Unis.

Le complot n’est pas derrière nous, il est devant, dans le chef de tous ceux qui ayant perdu la boussole refusent de rechercher le Nord, faisant de l’irraison d’Etat l’alibi de la fatalité.

P. Delgleize


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