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Le CSA vole au secours d’Alain Finkielkraut : un exemple à suivre

posté le 21/04/16 par Samuel Gontier Mots-clés  luttes sociales  médias  alternatives 

Bravo le CSA ! En réprimandant France 2 et David Pujadas, les « sages » du Conseil supérieur de l’audiovisuel s’attaquent courageusement à un fléau récurrent des émissions d’informations : l’omission des qualités des personnes invitées à s’exprimer à l’antenne. Comment se faire une idée de la pertinence d’un discours sans connaître les engagements partisans, militants, syndicaux de son auteur ? Comme on disait à une autre époque : « D’où parles-tu, camarade ? »

La semaine dernière, les conseillers du CSA ont donc adressé à France 2 un salutaire rappel à l’ordre, reprochant aux journalistes de l’émission Des paroles et des actes du 21 janvier de n’avoir pas précisé qu’une intervenante, Wiam Berhouma, était liée à un groupuscule islamo-gauchiste – les Indigènes de la République –, David Pujadas l’ayant présentée comme une enseignante musulmane sans affiliation partisane.

L’insolente a profité de cette impéritie pour agresser notre Finkie national, lui a reproché ses « théories vaseuses et très approximatives », s’est permis un inacceptable « Pour le bien de la France, taisez-vous, monsieur Finkielkraut ! » De nombreux téléspectateurs, en état de stress post-traumatique après cet acte de terrorisme intellectuel dont ils auraient pu se prémunir s’ils avaient su que son auteur représentait l’ultra-gauche antisémite, se sont légitimement plaints au CSA.

Je me réjouis de sa décision si judicieuse qu’elle mérite d’être citée : « Après examen, le Conseil a regretté que le journaliste qui menait le débat n’ait pas fait état des éléments permettant de considérer que l’intervenante avait un engagement militant sur le sujet abordé lors du débat, alors qu’une telle information, dans le cadre d’une émission politique abordant des sujets controversés, aurait été utile pour la bonne compréhension des enjeux par le téléspectateur. En conséquence, le CSA a demandé aux responsables de France Télévisions de veiller à respecter, à l’avenir, leurs obligations en matière de rigueur dans la présentation et le traitement de l’information. »

J’applaudis. Le manque de « rigueur dans la présentation et le traitement de l’information », je le déplore à longueur de Ma vie au poste. Pour aider le CSA dans son juste combat, j’ai décidé de lui signaler les inexcusables omissions de la mention de la qualité des intervenants dans d’autres émissions. En exclusivité, voici ma missive et sa liste de graves manquements à la déontologie journalistique.

Cher président, chers conseillères et conseillers,

Encouragé par votre providentielle condamnation de la non-dénonciation par David Pujadas de l’engagement extrémiste de Wiam Berhouma, je me permets de vous transmettre ci-dessous une liste (non exhaustive) de cas similaires repérés dans le cadre de mon activité de blogueur afin que vous puissiez sanctionner les fautifs.
Le 6 novembre 2014, un des « quatre Français choisis par TF1 » pour interroger François Hollande dans l’émission En direct avec les Français est présenté comme « titulaire d’une capacité en droit, demandeur d’emploi », Gilles Bouleau s’abstenant de préciser que Hasen Hammou fut aussi candidat du Parti radical de gauche sur une liste menée par Sonia Ghali à Marseille.
Le 5 mars 2016, le 20 heures de TF1 présente un reportage sur les « articles obsolètes, incongrus et même totalement inapplicables » du code du travail, « ce pavé de 3 700 pages », selon Anne-Claire Coudray, reportage qui s’appuie sur les propos de Charles Locquet, « chef d’entreprise », sans prendre la peine de mentionner qu’il est aussi conseilleur départemental (UMP) de l’Oise, conseiller municipal de Beauvais et président de la CGPME de l’Oise.

Les 14 novembre 2014 et 5 janvier 2016, le 20 heures de France 2 réalise deux reportages pour célébrer un « rebond inattendu de la croissance française » puis illustrer les effets escomptés d’« une nouvelle prime à l’embauche » dans la société d’Alexandre Morette-Bourny, « co-gérant de l’entreprise » sans indiquer qu’il est aussi président d’un syndicat patronal, le Centre des jeunes dirigeants d’entreprise de l’Essonne.

Le 13 août 2015, Soir 3 diffuse un reportage chez Carole Joliff, « éleveuse de porcs », sans informer les téléspectateurs qu’elle est aussi présidente de la section porcine de la FDSEA des Côtes-d’Armor.

Les 2 et 3 septembre 2015, le 20 heures de TF1 présente une manifestation d’agriculteurs comme un « défilé de la France agricole » en omettant d’indiquer que cette « colère paysanne » est organisée par la FNSEA. Un reportage chez Christian Decerle, qualifié d’« éleveur charolais », s’absout de signaler qu’il est ancien vice-président de la FNSEA et actuel président de la Chambre d’agriculture de Bourgogne.

Le 5 septembre 2015, le 19/20 de France 3 diffuse un reportage de Louis Laforge « au plus près » d’une « éleveuse de l’Allier » mais le reporter ne révèle pas que Viviane Alloin est maire de Sazeret et candidate UMP aux élections régionales de 2010.

Tous les jours de l’année, les journalistes de divers médias audiovisuels interrogeant Xavier Beulin sur « la crise des éleveurs » le présentent comme « président de la FNSEA, le syndicat majoritaire » sans jamais mentionner qu’il est aussi pdg d’Avril-Sofiprotéol, multinationale leader de l’alimentation animale en France.

Les 26 avril 2011 et 20 mars 2016, le 20 heures de TF1 diffuse un exposé en 3D de Fabrice Collaro puis un « reportage exclusif » en Ukraine pour vanter « un projet titanesque », « une prouesse technologique », la réalisation de « l’arche géante de Tchernobyl » – le nouveau sarcophage du réacteur numéro 4 –, sans spécifier qu’elle est construite par un consortium réunissant Vinci et Bouygues, propriétaire de TF1.

Cher président, chers conseillères et conseillers, j’ai conscience de ne fournir ici qu’un faible aperçu des nombreuses omissions préjudiciables à « la bonne compréhension des enjeux par le téléspectateur ». Aussi, je m’engage à vous signaler à l’avenir tout manquement dans la présentation de ses intervenants. En attendant, je suis persuadé que vous ne manquerez pas d’adresser des rappels à l’ordre aux chaînes et journalistes cités dans cette lettre avec le discernement dont vous avez fait preuve pour condamner l’odieuse duplicité de Wiam Berhouma et la coupable négligence de David Pujadas.

Soyez assurés, cher président, chers conseillères et conseillers, de ma dévouée collaboration,
Samuel Gontier


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