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Lettre ouverte d’un anarchiste à un racialiste identitaire maquillé en anar. Pour en finir avec le communautarisme majoritaire ou minoritaire. Mort aux identités !

posté le 23/08/18 Mots-clés  antifa 

Dénoncer l’islamophobie ou protéger l’Islam ?

L’objet premier de cette critique est de remettre un peu d’ordre à propos de l’utilisation du terme « islamophobie », de montrer que ce concept, si il désigne effectivement une certaine réalité des rapports sociaux, est souvent utilisé de manière outrancière, et finira par être l’allié objectif des propagateurs de religion. Nous prendrons appui, pour formuler cette critique, sur un texte formulé par des gens appartenant à la famille politique des libertaires et de l’extrême-gauche, puisque celui-ci nous semble particulièrement représentatif de tels écueils, ceux-ci étant d’autant plus graves lorsque diffusés par des gens ayant normalement une conscience critique par rapport aux religions. (texte intitulé « Appel des libertaires contre l’islamophobie », diffusé sur différents sites libertaires).
La raison essentielle et pratique qui nous a poussé à réagir à ce texte, c’est l’acharnement par lequel il prétend empêcher une critique générale des religions incluant l’islam, en assimilant toute critique de l’islam à de l’islamophobie.
Ensuite, il s’agit de voir, d’une manière plus large, d’où viennent ces faiblesses actuelles largement répandues même chez les gens se réclamant d’une critique sociale, de la gauche du PS aux libertaires et anarchistes, de comprendre les idées et les raisonnement intellectuels qui sous-tendent la formulation de cet appel ; celui-ci n’étant pas un phénomène isolé, mais étant influencé par un ensemble d’idées beaucoup plus large que l’on peut qualifier de post-modernes, et dont les gens d’extrême gauche forment souvent des agents de diffusion privilégiés, de manière plus ou moins consciente.
Nous précisons que nous n’en voulons pas particulièrement aux gens qui ont formulé cet appel, même si nous critiquons l’influence de ces idées dans ce milieu. Nous aurions pu trouver d’autres exemples relevant de cas moins isolés et diffusant ce genre d’idées beaucoup plus massivement, par ailleurs formulés par des gens éloignés de notre « famille politique », impliqués dans la sphère politicienne. Mais comme nous l’avons dit, cet exemple nous intéresse car il montre l’influence d’un ensemble d’idées issues du post-modernisme sur les gens d’extrême-gauche, alternatifs et libertaires, amenant ceux-ci à prendre des positions pour le moins surprenantes.
Nous entendons critiquer toutes les religions à partir des textes sur lesquelles elles se fondent et de leur histoire, et non par rapport à de simples critiques circonstancielles sur l’extrêmisme que prendrait tel ou tel phénomènes religieux. Ainsi, il est révélateur que ces gens ne parlent plus de critique des religions, mais « des « formes d’oppression que peuvent prendre les phénomènes religieux ». Qu’est ce que cela signifie ? Que les religions et les textes sacrés ne sont plus critiquables en soi, pour ce qu’ils sont et ce qu’ils disent, mais que seules certaines manifestation de cet esprit religieux le sont ?
Il va de soi que la formule vise avant tout à ménager la religion islamique, en vertu du contexte de cet appel, lorsque nous connaissons la propension de beaucoup de gens d’extrême-gauche à critiquer les religions tout en y excluant l’islam, pour des raisons opportunistes que nous verrons par la suite.
Ce texte ne se contente pas de dénoncer l’islamophobie, il prend parti pour une défense de l’islam, en mettant cette religion à l’abri de la critique. Ainsi, si ces libertaires observent parfois chez leurs camarades « une condamnation claire de l’islamophobie », ils regrettent que celle-ci soit « couplée de moult rappels du combat primordial contre l’aliénation religieuse » !
Parler de l’aliénation religieuse, lorsqu’on combat l’islamophobie, n’est donc pas une position acceptable selon ces gens. Jusqu’où croient-ils nécessaire cette compromission ?
Critiquer une religion, ce n’est pas affirmer l’infériorité du pratiquant de cette religion, ni établir une hiérarchie entre le croyant et le non-croyant, le musulman et l’athée.
Les critiques les plus radicales de l’aliénation religieuse peuvent d’ailleurs s’exprimer dans le cadre religieux, lorsque celui-ci ne permet pas autre chose ; il suffit de prendre comme exemple Descartes pour le catholicisme, qui propose le développement de sa méthode basée sur le scepticisme, la vérification et l’empirisme (donc à l’opposé d’une acceptation béate de la réalité) comme une justification de l’existence de Dieu.
Nous ne voyons donc aucune incohérence à ce que l’Islam soit critiqué par des musulmans, c’est au contraire souhaitable, et pour nous le fait d’être croyant n’implique pas d’être dénué d’esprit critique.
Ce que nous entendons par islamophobie, si l’on veut bien donner un sens à ce mot qui ne relève pas de la chasse aux sorcières contre toute personne critiquant l’islam, se rapprocherait d’un dégoût primaire et irrationnel pour ce qui relève de cette religion ou lui est assimilé (en gros « l’étranger »), et l’exploitation de cette peur par les courants racistes et nationalistes. La peur et la phobie ne relèvent pas pour nous d’une critique construite et raisonnée.
Nous pensons juste de dénoncer les opinions racistes déguisées en critique de l’islam là où elles existent. Que cet amalgame pratiqué par des courants nationalistes et racistes permette à l’islam d’échapper à la critique, nous ne l’admettons pas.
Nous pensons nécessaire de dénoncer l’oppression ciblé contre des musulmans ou des gens d’autres confessions en vertu de leurs croyances et de leurs pratiques religieuses, là ou cela se produit.
Nous pensons également nécessaire, de montrer, par exemple, le statut réservé aux femmes selon le Coran, qui sont selon ce texte clairement inférieures aux hommes et se doivent de leur être soumises. Ceci n’est pas réservé au Coran mais y est tout de même très explicite. Car la réalité n’est pas univoque, le fait que les musulmans puissent être oppressés, n’empêche pas que des situations d’oppression peuvent exister dans la pratique de cette religion.
Il ne faut pas oublier le fait que chaque religion est créé dans un contexte historique particulier. Ainsi, il faut prendre en compte que l’Islam a été développé dans un contexte où la société était formée de tribus nomades, avec les pratiques et les moeurs qui sont les leurs. Ceci non pour émettre des jugements de valeurs, mais qu’il est légitime de reconnaître le décalage entre les peuples dans lequel l’Islam est apparu au départ et les peuples qui le pratiquent aujourd’hui.
Ainsi l’économie de ces peuples tribaux relevait en partie de la pratique du pillage et de la prise de butin, dont les esclaves et les femmes, considérés comme des biens, un moyen d’échange, d’où l’existence de nombreux versets ne prenant sens que dans ce contexte particulier. Ex : sourate IV, Les Femmes, verset 3 : « Si vous craignez d’être injuste envers les orphelins, n’épousez que peu de femmes, deux, trois ou quatre parmis celles qui vous auront plu. ». Nous ne voulons pas émettre de jugement dépréciatif, mais nous tenons à rappeler, selon toute logique, qu’une polygamie exclusive n’est possible que dans le contexte de sociétés fortement inégalitaires, où les femmes sont accaparées par les plus riches, les dominants. Ou dans une société fonctionnant sur le principe du pillage et de la conquête, les femmes des vaincus pouvant alors être prises par les vainqueurs. Nous ne dirons rien sur le statut qui est fait aux femmes selon de tels principes.
Nous pensons légitime également de montrer quelles prétentions à le Coran de régler la vie publique des fidèles, de montrer que ces textes écrits tels qu’ils sont et appliqués dans beaucoup d’endroits sont rétrogrades et réactionnaires.
Nous pensons nécessaire de montrer le Coran avec les autres religions monothéistes pour ce qu’il est : une religion essentiellement patriarcale, fixant des mœurs et une répression sexuelle propre à ce régime patriarcal.
La question n’est pas de démontrer la supériorité d’un quelconque « discours occidental » , mais de montrer qu’en soi, l’élément identitaire islamique n’est pas et ne saurait en aucun cas être une alternative aux logiques de domination.
Nous sommes d’ailleurs sceptiques devant certaines accusations de racisme de ces libertaires : Michel Onfray, Charlie Hebdo, si ils sont critiquables par la place qu’ils occupent dans la pseudo-intelligentsia, sont ainsi assimilés à une pensée raciste à peu de frais. On reconnaît bien ici la logique de la chasse aux sorcières, puisqu’il ne sera pas la peine de démontrer que ces gens sont effectivement racistes par leurs discours (qu’on aurait du mal à produire), mais par les seules intentions qu’on leur prête au nom d’une logique inventée par les mêmes accusateurs, que l’ont peut résumer par l’équation « critique de l’islam=racisme ».
Bien que ce texte nous parle de dépasser les oppositions et les divisions spectaculaires, il n’a visiblement pas bien compris quels sont les tenant de cette division, ni comment elle est produite. Nicolas Sarkozy n’a pas hésité pas à serrer les paluches aux ecclésiastiques, au recteur de la mosquée de Paris, a encourager les religions diverses, et ensuite souffler sur la flamme de l’islamophobie pour rassurer le « français moyen » menacé dans son identité. La réalité du pouvoir n’est pas d’être proprement « islamophobe », mais de jouer sur les 2 parties.
L’islamophobie se déploie il est vrai comme une division spectaculaire, visant les masses à s’affirmer par de fausses identités.
Il n’ y a pas pour nous, de choix à faire entre une idéologie nationaliste et raciste d’un côté, et une position en faveur de l’islam en tant qu’élément identitaire des opprimés de l’autre. L’intelligence consiste à reconnaître cette opposition là où le pouvoir la met en scène, et à la dénoncer, et non pas à se placer pour l’une ou pour l’autre en vertu de positions stratégiques illusoires.
Cette position pro-islam déguisée participe d’ailleurs à l’assimilation entre arabes et musulmans, au lieu de la critiquer. On essentialise ici un peuple en pratiquant ce déterminisme religieux-identitaire. On fait peu de cas des arabes athées ou en conflit avec leur univers religieux. Il n’est pas suffisant de dénoncer l’influence du salafisme dans le mahgreb et machrek. Au-delà des groupes les plus fondamentalistes, c’est l’ensemble des peuples de ces pays qui est traversé d’éléments idéologiques, de partis, d’opinions contradictoires, hésitant entre révolution sociale et positions identitaires-religieuses.
Nous soutenons qu’il faut permettre à cette critique de s’exprimer et l’encourager, telles que le font certain-e-s féministes, militant-e-s laïcs ou progressistes (qui sont par ailleurs souvent musulmans) dans ces pays, qui pointent courageusement l’oppression dans laquelle ces pays baignent et quel harcèlement et frustration sexuelle sévit dans ces pays, en relation avec l’application de certains préceptes du Coran et la pesanteur de l’Islam sur ces sociétés. Répression qui existe aussi dans les pays occidentaux sous une forme moins explicite et plus perverse mais qui ne se manifeste pas avec autant de pression sur les femmes et n’exige pas d’elles une soumission telle que dans beaucoup de pays musulmans.

Nous disons donc, en quelque sorte, que les libertaires de cet appel ont lâché la proie pour l’ombre, c’est à dire la critique de l’aliénation religieuse, dans laquelle a pu prendre sa source la vénération de l’argent et la soumission au capitalisme, pour une prise de position circonstancielle et dangereuse, en l’occurrence la défense de l’islam sous prétexte qu’en tant que religion originaire d‘Afrique et appartenant à des minorités opprimés (or ce cliché est faux), sa critique relèverait forcément de l’affirmation d’un esprit européen néo-colonialiste et raciste.


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