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Parlons aussi des arrestations arbitraires : beaucoup de presses parlent de « mouvance anarchiste ».

posté le 22/12/13 par Julien Artoisenet Mots-clés  luttes sociales  médias  répression / contrôle social  réflexion / analyse  solidarité  D19-20 

Texte rédigé par Julien Artoisenet et publié avec son accord suite aux arrestations qui se sont déroulée à la suite de la mobilisation de l’Alliance D19-20 (www.d19-20.be).

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Le 22 décembre 2013 – Julien Artoisenet

Parlons aussi des arrestations arbitraires : beaucoup de presses parlent
de « mouvance anarchiste ».

Pour une défense collective du D19-20 : nous sommes tous concernés.

Je suis chercheur doctorant en sociologie et je suis venu au blocage dans le cadre de ma recherche sur les organisations agricoles. J’ai terminé la journée comme citoyen de seconde zone. Plusieurs points méritent d’être soulevés :

Ces arrestations arbitraires sont le résultat d’un déni d’existence et de démocratie.

Un des buts de l’action D19-20 était de se faire entendre auprès des dirigeants. Aucun des trois sollicités (Di Rupo, De Gucht, Van Rompuy) n’a accepté de nous rencontrer. Ce déni d’existence et de démocratie explique la volonté de ceux qui auraient voulu bloquer pacifiquement les voitures de certains dirigeants qui arrivaient encore après 14h. Au lieu de recevoir les citoyens, c’est la police qui nous a finalement accueilli. Une partie des arrestations ont aussi été le résultat d’actes de solidarité de citoyens venus soutenir les premiers arrêtés.

Certaines presses se font l’écho de l’idéologie sécuritaire des forces de l’ordre

Il faut dénoncer les tentatives de stigmatisation qui sont faites par la police et reproduites par beaucoup de médias (La Libre, Le Soir, L’avenir, Rtl...) notamment en utilisant l’étiquette « mouvance anarchiste » qui fait peur à beaucoup de gens et qui a pour effet de nous disqualifier auprès de ces personnes, le terme d’ « anarchie » étant très souvent perçu comme synonyme de désordre et de danger plutôt que comme un ensemble d’idées politiques. Nous ne sommes pas des citoyens de seconde zone et personne ne l’est. L’absence de débat public avec les dirigeants sur les deux traités remis en cause explique les actions menées. La voix qui a été portée ce jour-là mérite d’être entendue et pas d’être réprimée.

Pour répondre à cette stigmatisation, il faut absolument montrer la diversité des profils des personnes qui ont été arrêtées. Ca permet de grandir la cause et de la crédibiliser en montrant que tout le monde est concerné par cet événement.

Dénoncer des comportements liberticides

A côté de la presse stigmatisante, c’est la liberté de la presse indépendante qui est aussi en jeu ici. La volonté manifeste de ne pas laisser filmer cet événement arbitraire est anti-démocratique et liberticide. Un cameraman qui voulait nous filmer s’est vu empêcher de le faire par un fourgon qui s’est tout de suite interposé entre nous et la caméra. Les comportements de certains policiers doivent aussi nous inquiéter : que penser de celui qui nous a adressé un salut nazi dans la caserne ?

Ne pas se laisser impressionner et refuser la division parce que l’enjeu en vaut la peine

Si ce type d’arrestation crée sûrement plus de cohésion et de détermination chez les manifestants directement concernés, c’est aussi un signal clair envoyé au reste de la population : contentez-vous de ce qu’on vous donne sinon on vous privera de liberté. Cette volonté de dissuasion et de division doit être aussi dénoncée comme stratégie utilisée pour perpétuer la domination en cours.

D19-20 : Nous sommes tous concernés

Enfin, avec cet événement, l’alliance D19-20 est peut-être mise à l’épreuve d’elle-même. La volonté de convergence et de détermination annoncée au départ doit prendre le pas sur le potentiel de division qu’une telle situation peut engendrer. Nous sommes tous concernés : la démocratie ne peut être réalisée sans possibilité de manifester en dehors des autorisations légales lorsque les citoyens ne sont pas entendus et sont niés dans leurs préoccupations politiques.

L’alliance D19-20 se justifie d’autant plus que ces arrestations ont eu lieu : elles sont le symptôme d’un système politique aveugle et non adapté à la construction d’un espace public digne de ce nom. La police doit être un service public qui défend l’ordre démocratique et pas le joker d’une classe dirigeante incapable de justifier certaines de leurs positions.

Doit-on accepter que ces dirigeants élus ne nous rendent pas des comptes, aucun de ceux interpellés n’ayant accepté la demande du D19-20 ? Comment nous faire entendre dans un contexte où une certaine presse stigmatise, tout comme la police, des militants qui cherchent à s’adresser aux dirigeants ? Ce n’est pas l’affaire de quelques personnes appartenant à "la mouvance anarchiste" comme le prétendent certains, mais bien celle de tous ceux préoccupés par notre avenir.

Ces arrestations totalement illégitimes doivent être dénoncées collectivement par l’alliance D19-20. Une des toutes premières positions courageuses de l’alliance D19-20 était qu’on ne bougerait pas tant qu’on ne serait pas reçu. Il faut recréer de la solidarité autour de ce point. C’est la crédibilité et la détermination de l’alliance qui sont aussi en jeu.

Sur la presse concernée (La Libre, Le Soir, L’avenir, Rtl, la DH) :

Énormément d’articles de presse ont relayé la même information : les personnes concernées appartenaient toutes à "la mouvance anarchiste". On a affaire à une entreprise de stigmatisation et de disqualification de certains qui ont voulu porter des idées politiques s’opposant à l’Europe néolibérale productrice d’austérité. D’après ces médias, les ’gentils manifestants’ seraient ceux qui ont respecté la règle de la dislocation du cortège prévue à 14h, ceux qui ont voulu continuer pacifiquement l’action sont des méchants "anarchistes". Cette étiquette est clairement utilisée comme stigmate, l’idéologie dominante ayant contribué à en faire un symbole de désordre et de danger. Aucune de ces presses n’étaient présentes sur place pendant ces arrestations et elles ont toutes prises pour argent comptant les dires de la police qui nous qualifiait d’anarchistes. Ces pratiques anti-journalistiques font de ces médias les portes-paroles des forces de l’ordre et de l’idéologie sécuritaire. Le nombre de presses concernées confirme à nouveau un manque de pluralisme plus qu’inquiétant. Ce déni de reconnaissance de citoyens en tant que tels, d’une part, et la lutte symbolique qui vise à dissuader quiconque voudrait porter des idées politiques en dehors du cadre imposé par les autorités pour pouvoir manifester, d’autre part, sont tous deux l’ennemi de la démocratie.

Quelques liens éloquents d’articles :
http://www.lalibre.be/actu/international/sommet-europeen-dislocation-du-cortege-des-manifestants-52b2fe733570105ef7d80f66 ("activistes de la mouvance anarchiste") ;
http://www.lavenir.net/article/detail.aspx?articleid=DMF20131220_00407250 ("activistes de la mouvance anarchiste") ;
http://www.dhnet.be/regions/bruxelles/sommet-europeen-79-arrestations-dans-la-mouvance-anarchiste-52b31d3d35701baedaa46865 ("arrestations dans la mouvance anarchiste")
http://www.lesoir.be/385144/article/actualite/fil-info/fil-info-belgique/2013-12-20/sommet-europeen-79-arrestations-administratives-et-3-arrestations ("activistes de la mouvance anarchiste")
http://www.rtl.be/info/monde/europe/1056506/sommet-europeen-79-arrestations-administratives-et-3-arrestations-judiciaires ("activistes de la mouvance anarchiste")


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Commentaires
  • 23 décembre 2013 05:01

    Le premier effet de la repression c’est de neutraliser les corps. Le deuxième de neutraliser les esprits. On part, résolus, pour une Cause. On revient, révoltés, contre la police.

    Il est de la fonction du policier de scandaliser le manifestant. Cela occupe ce dernier au-delà de l’enfermement. Cela fait de toutes causes, même et surtout pacifique, une complainte contre l’uniforme où dilapider son énergie. Et cela ne demande pas un effort particulier, le policier n’étant jamais qu’un délinquant qui a mal tourné.

    D’autre part, en tant que zizi de l’Etat auquel se mesurer, le bout de la matraque est hypnotique. Surtout lorsqu’on a des diplômes. Mais il n’a depuis longtemps que deux testicules, syndical et législatif. On peut aboyer contre le chien. Cela n’a jamais plus d’effet que de tenter de mordre le maître.

    En l’occurence, tant que l’arrestation préventive est inscrite dans la loi, tant que la police belge est inconditionelement protégée par ses syndicats, tant que le lecteur du Soir pense qu’il y a d’un côté les policiers de l’autre les bandits et des contestataires pour gêner la circulation, tout va bien.

    Au-delà de la semaine succédant une mobilisation contre un sommet européen, qui n’a d’ailleurs peut-être de démocratique précisèment que la police qui le protège puisque c’est la seule chose avec laquelle il ait le moindre rapport avec le peuple, les bavures quotidiennes passent sans susciter jamais autant d’indignation de la part des militants diplômés.

    Il me semble que la meilleure façon de revenir sans se faire voler sa Cause serait donc peut-être de partir un peu plus révoltés la prochaine fois. Sur ce plan, on ne peut douter que la police soit encore l’une des meilleures institutions d’éducation permanente que compte le Royaume, même s’il faut de temps à autre ouvrir aussi la DH pour tout bien comprendre.

  • Information neutre des médias ? Quelle indépendance ! Regardez qui détient ces médias (essentiellement des familles qui sont dans le top des 25 familles les plus riches de belgique)et vous comprendrez que les médias ce contentent de diffuser une seule pensée : la pensée unique donc l’ultra libéralisme .

  • 23 décembre 2013 12:33

    Faut arrêter de crier à la démocratie. La démocratie n’est plus là que pour maintenir le pouvoir aux politiques, soutenus par le système capitaliste et leurs multinationales.

    Faut arrêter de crier à la démocratie : elle a été remplacé par la politique de l’ordre établi, sans nuances.

    Faut arrêter de crier à la démocratie:elle n’est plus là que par ces "élections" , moment ou chacun croit avoir un droit de choisir, de se présenter.

    Non on ne vous entend pas, on ne vous écoute pas : vous n’êtes,diplômés ou non, que "des petits cons" qui croient avoir encore un droit de parole.

    Non y a plus de droit de quoi que ce soit sauf le droit de se taire et de marcher dans les rangs de cet ordre établi !

    Non ce ne sont pas des arrestations arbitraires : vous aviez bien violé l’accord formater par les organisateurs du bloquage et les autorités. A 14 heures il fallait rentrer dans vos chaumière. C’est ça l’ordre établi !

    Marchez dans les rangs, participez aux élections, votez : Ce ne seront que quelques nouveaux qui participeront à cet ordre établi sous couverture d’une démocratie de façade.

    Et pour ceux qui ont passé 11 malheureuses heures au caserne, sachez que tout les jours dans nos commissariats, nos prisons, nos centres fermés, des précaires, des sans papiers, des bandits, des jeunes....sont soumis à des arrestations "arbitraires" et subissent une répression aveugle, loin des regards.

    "Mais ça c’est eux, pas nous."

  • 24 décembre 2013 06:36

    Il y a ceux qui veulent se battre contre le capitalisme. Mais un certain nombre ne veulent pas se battre avec les syndicats. D’autres, parfois les mêmes, voudraient plutôt se battre contre la police et encore pas mal semblent maintenant plutôt interessés par se battre contre les journalistes. Comme chaque année, c’est ceux qui voudraient se battre contre l’Etat qui manquent sur la photo.

  • 27 décembre 2013 20:55, par René

    allez voir l’article poste le 22/12/13 dans la rubrique "global" "german police eating stones in Hamburg" c’est intéressant !

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