RSS articles
Français  |  Nederlands

1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10

Réponse aux anti-anti couvre-feu

posté le 24/11/20 par Cortege2Braises Mots-clés  répression / contrôle social  réflexion / analyse  solidarité  Liège 

Julien Delaunois (MR Liège) s’est fendu d’un coup de gueule mal placé sur les réseaux asociaux concernant le cortège anti couvre-feu de la semaine dernière à Liège. Ce post courageux a été partagé... 15 fois, mais la Meuse a décidé de le publier en carte blanche dans ses colonnes, tout en refusant le droit de réponse reproduit ci-dessous car le sujet en vaut la peine.

"Bien sûr que nous en avons tous marre de cette situation, que cette façon de vivre est particulièrement dérangeante, mais cette manifestation ou plutôt cet amas, n’est qu’un appel à l’anti-solidarité des plus vulnérables devant ce virus de notre société… "

L’appel du cortège était "Contre le couvre-feu, pour des mesures sanitaires solidaires" et avait pour objectif principal de visibiliser le manque de prise en compte des plus vulnérables. La première prise de parole devant une maison médicale, par une infirmière en soins intensif, soulignait : "Remettre en question les mesures qui excluent encore plus les plus démuni·es est ici un acte de soin".

L’autre objectif était de souligner qu’on ne pourrait pas sortir de cette situation "particulièrement dérangeante", qu’on ne pourrait pas lutter contre ce virus, sans des mesures sanitaires cohérentes. Notre communiqué de presse commençait comme ceci :

"Depuis l’hiver passé, les autorités ont démontré leur impréparation face à la pandémie du Covid-19. Ces six derniers mois, malgré les alertes et propositions des secteurs de la santé et du travail social, elles n’ont rien fait de conséquent pour anticiper la deuxième vague de contaminations, d’hospitalisations et de surcharge pour le personnel soignant.

Par exemple :
- Pas d’embauches ni de formation de personnel en suffisance ou de revalorisation effective dans les secteurs qui se sont montrés essentiels ;
- Peu de contrôles (et encore moins de sanctions) pour les grandes entreprises qui refusent de protéger leurs travailleuses/eurs ;
- Pas de concertation suffisante avec les travailleuses, bénévoles et usagères des services sociaux et sanitaires, les plus à même de comprendre et identifier les enjeux de la situation que nous traversons ;
- Pas d’investissement massif pour adapter certains foyers de contaminations dans le but de ne pas les faire fermer entièrement (écoles, lieux culturels, etc.) ;
- Pas d’augmentation significative de l’offre de transports en commun, de la capacité de tests, du nombre de profs pour réduire la quantité d’élèves par classe, etc."

Combien de cartes blanches Julien Delaunois a-t-il fait sur ces sujets ? Il est membre du MR, ce parti qui a coupé dans le budget des soins de santé et n’a pas fait renouveler les stocks stratégiques de masques pour... faire des économies.

"S’ils veulent manifester, qu’ils le fassent au moins en respectant les règles sanitaires."

Est-ce qu’il se souvient au moins de l’époque où le gouvernement nous dissuadait de porter des masques ? Le communiqué de presse du cortège invite à penser par nous-mêmes et à nous approprier ce virus, pas à suivre des règles - changeantes et parfois incohérentes - sans se poser de question. Qui prend ses responsabilités face à la pandémie et à sa gestion catastrophique ? Qui préfère se reposer sur l’infantilisation et la culpabilisation inefficaces ?

Sincèrement, peut-il nous dire combien de personnes se sont contaminées les unes les autres durant ce cortège magnifique ? Nous étions à l’extérieur, avec masques buccaux pour une majorité d’entre nous et manifestations de fait par "bubulles" (colocataires, couples, ami·es). Ceci n’est pas une justification, mais une question sincère face à une hypocrisie moralisatrice.

Ce cortège rassemblait de biens meilleures conditions sanitaires que dans les clusters avérés (entreprises, transports insuffisants, classes trop remplies et mal ventilées, ...). Il y a peu, la DG Contrôle du bien être au travail reconnaissait que "le virus peut de nouveau [y] circuler librement" [1]. Que propose notre influenceur facebook en carton pour lutter contre cette situation inacceptable qui se maintient depuis plus d’une demi année ?

"C’est une mesure [le couvre-feu] qui a un objectif : limiter les contacts, détaille-t-il. Le but, c’est d’arrêter la propagation du virus.". D’accord... quelles sont les études, chiffres ou enquêtes qui démontrent cette affirmation ? Concernant les clusters précités, il ne s’agit pas simplement de le dire, mais de l’observer dans les faits et d’agir en conséquence.

Le couvre-feu est une mesure antisociale et autoritaire. Mobiliser l’argument faussement sanitaire pour suspendre les droits fondamentaux (de réunion, de rassemblement, de manifestation, de déplacement) est une grave erreur de communication et une grave erreur politique.

"En plus, ils ne sont pas au bon endroit : qu’ils aillent rue de la Loi, ou à Namur, c’est là qu’on a décidé du couvre-feu.". Premièrement, c’est mal comprendre à qui nous nous adressons. Nous nous adressons au reste de la population, et plus particulièrement celle qui subit le plus les politiques néolibérales, certainement pas aux irresponsables qui prétendent nous gouverner. Deuxièmement, l’auteur enflammé tape à nouveau à côté de la cible et aurait pu se renseigner un minimum : nous avons justement choisi un parcours et des temps d’arrêts qui symbolisaient certaines des réalités les plus invisibilisées. Le couvre-feu pénalise et ignore les personnes piégées dans des foyers face à des agressions psychologiques, physiques et/ou sexuelles, les personnes sans abris (qui ne peuvent plus s’approvisionner tard et sont encore plus isolées), les travailleuses et travailleurs du sexe (à qui le MR liégeois veut ajouter une taxe supplémentaire), les personnes travaillant dans le commerce nocturne, les personnes toxicomanes (qui se retrouvent dans une situation encore plus dangereuse), etc.

Nous savons que ce n’est pas le public préféré du MR, ni de l’auteur qui n’en n’a pas dit un seul mot dans son "coup de gueule", alors que c’était l’objet même du cortège. Quoiqu’il en soit il s’agit bel et bien de "personnes vulnérables" (ou plutôt vulnérabilisées) dont l’existence n’a pas à être niée sous couvert de bonne morale.

Nous n’argumenterons pas sur l’ hypocrisie intellectuelle du facebookeur qui consiste à amalgamer notre révolte avec un déni de la deuxième vague ou du virus lui-même. 

Quand il écrit : "J’attends donc les proches et les familles de ces revandicateurs dans notre service de réanimation ...", que sous entend-il par là ? Certain·es d’entre nous avons perdu des proches de la covid19. Bon nombre d’entre nous sommes soignant·es (infirmières·ers, brancardiers·ères, kinés, vétos, aides soignant·es à domicile, étudiant·es en médecine, psychologues, etc.), et nous ne nous reconnaissons pas dans votre lecture de la situation ’sieur Delaunois. Nous prenons soin les un·es des autres et c’est précisément pour cela que nous refusons de continuer le jeu de cette comédie morbide.

Des braises

[1] https://secoursrouge.org/belgique-confinement-la-dg-controle-du-bien-etre-au-travail-reconnait-que-le-virus-circuler-librement-dans-des-entreprises/


posté le  par Cortege2Braises  Alerter le collectif de modération à propos de la publication de cet article. Imprimer l'article
Liste des documents liés à la contribution
cortegedebraises(...).jpg

Commentaires
  • Aucun commentaire

Avertissement

Les commentaires ont pour objectif de compléter l’information donnée dans l’article, argumenter, apporter une interrogation ou un questionnement par rapport au sujet de la contribution. Les avis personnels qui n’apportent rien de plus à l’article pourront être considérés comme discussion de forum ne répondant pas aux objectifs pré-cités.Tout commentaire ne répondant pas à ces objectifs, ou étant contraire aux règles éditoriales sera supprimé définitivement du site.

Lien vers la politique éditoriale du collectif

le site est archivé