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Résistance à la taule de Réau. Procès de Christine, la bergère drômoise, à la Cour d'Appel de Paris. Ou combien de mois fermes pour un treizième mois ?

posté le 08/09/14 Mots-clés  répression / contrôle social 

Accusée d’avoir mordu un maton de Réau, le 5 mars 2014, le Tribunal Correctionnel de Melun condamne Christine à 1 mois ferme et 200€ de dommages et intérêts à verser au maton. Quelques jours après, le parquet, trouvant cette peine trop clémente, a fait appel. Vendredi 26 septembre à 13h30 Christine sera donc re-jugée à la Cour d’Appel de Paris (pôle 2 chambre 9).
Mi-octobre 2013, Christine se fait incarcérer au Centre de Détention de Réau en banlieue parisienne (voir ici sur les événements précédents). Dès son arrivée, elle refuse de prendre la carte de circulation nécessaire aux passages des multiples sas de sécurité au sein de la taule. Elle est alors maintenue en « régime de portes fermées ». Pour les détenues placées sous ce régime, une seule pièce, la « salle de convivialité », permet de passer des moments ensemble. Début décembre, l’Administration Pénitentiaire (AP) décide de fermer cette salle sans donner de motif à cette décision.
Immédiatement, Christine demande des explications. L’AP n’apprécie pas trop cette insolence et lui colle au total 21 jours de mitard en faisant tomber des Comptes Rendus d’Incidents gardés sous le coude. Au mitard, elle continue de protester, mais cette fois-ci pour obtenir un poste radio (obligatoire au mitard depuis la loi pénitentiaire de 2009). à sa sortie du mitard, elle rédige avec ses co-détenues un courrier destiné à l’AP, revendiquant la ré-ouverture de la « salle de convivialité » ainsi qu’une ouverture exceptionnelle de cette même salle le 1er janvier pour prendre ensemble le repas de midi. L’AP tarde à répondre, et le 31 décembre le chef de détention Ha-o-kwie convoque Christine pour lui rendre, à elle seule, la réponse négative. Elle proteste et refuse de devoir annoncer elle-même cette réponse à ses co-détenues. Ha-o-kwie insinue alors que c’est elle la meneuse et qu’elle aurait manipulé ses co-détenues pour rédiger la lettre de revendications. Elle fait un pas de défiance en avant. Là, trois autres matons restés à proximité l’agrippent par les bras pendant qu’Ha-o-kwie la menace en agitant son index sous le nez de Christine. Pour stopper cette humiliation, elle lui pince le doigt avec les dents. Menottée, les matons la collent au sol pendant qu’Ha-o-kwie lui envoie des coups de poing au visage.
Suite à cette altercation, Christine prend 30 jours de mitard. Ne voulant pas rater l’occasion de se faire un treizième mois, Ha-o-kwie porte plainte pour violence. Le 5 mars 2014 elle est jugée par le tribunal de Melun qui le condamne à un mois ferme plus 200€ de prime à verser à Ha-o-kwie. Trouvant cette peine trop clémente le parquet fait appel dans la foulée.
Christine est aujourd’hui au Centre Pénitentiaire de Fleury-Mérogis (voir ici les derniers événements). En 20 mois de détention, il s’agit de son septième transfert disciplinaire et donc de sa huitième taule. En 20 mois elle en aura passé près de 280 jours au mitard et 70 jours en quartiers d’isolement. Après avoir écopé de 6 mois fermes et plusieurs centaines d’euros à verser à différents matons de Bapaume au Tribunal d’Arras, c’est maintenant la Cour d’Appel de Paris qui veut venir en rajouter une couche. (Voir ici à propos du procès d’Arras).
N’appréciant pas les réfractaires, l’Administration Pénitentiaire, avec l’appui de la Justice, joue la carte de l’acharnement pour tenter de détruire Christine. Ne laissons pas Christine seule face à la machine à broyer.


Soyons nombreux vendredi 26 septembre 2014 dès 13h00
pôle 2, chambre 9 de la Cour d’Appel de Paris

(4 Boulevard du Palais (métro Cité)

D’ici là et après, pour lui écrire, voici sa nouvelle adresse à Fleury-Mérogis :
Christine RIBAILLY, écrou 413326, MAF-QD, 7 avenue des peupliers, 91700 FLEURY-MÉROGIS

Ci-dessous un extrait d’un des dernières lettres de Christine :


MAF de Fleury-Merogis, mardi 26 août,

J’ai pu faire une heure de sport depuis que je suis à Fleury ! Une heure en deux mois, c’est pas ce qui m’a fait maigrir... Mais là-bas au gymnase, j’ai pu rencontrer les basques qui sont enfermées ici et ça m’a fait du bien de pouvoir causer à des gens qui comprennent le combat politique.
Je suis sortie le 6 août du mitard, je pensais être transférée le jour même à Poitiers, mais il ne devait pas y avoir de place. Donc le lendemain, après 24h en bâtiment « normal », ils ont crée un incident pour me refoutre au mitard. Au prétoire, j’ai pris 10 jours, donc sortie le 16. Retour en bâtiment pour 3 jours, le prétoire suivant était le 19. Durant ces trois jours il n’y avait plus d’escorte spéciale et j’ai pu bouger comme les autres filles, sans surnombre de matons. C’était vachement moins stressant, je te l’assure ! Il y a une semaine, j’ai donc repris 20 jours, jusqu’au dimanche 7 septembre. Comme ils ont plein de CRI en stock, je ne doute pas que j’aurai un autre prétoire le 9, histoire de me tenir au QD jusqu’au transfert... qui officiellement doit avoir lieu le 27 (3 mois maxi de transit).
Le 26 septembre, ce sera la procès en appel à Paris. En effet à Melun, le 5 mars, j’ai chopé 1 mois suite à l’engueulade avec le bricard de Réau à qui j’avais chiqué l’index accusateur. Le proc’ avait trouvé ça trop léger et a fait appel. ([mon avocat] dit que c’est loin d’être gagné vu qu’entre temps mon dossier disciplinaire s’est encore alourdi. Certes, les peines planchers ne sont plus automatiques, mais rien n’empêchera le juge de me coller un an (comme le réclamait le proc’) si ça l’amuse.)
Ici à Fleury, les filles sont palpées systématiquement quand elles sortent de cellule. C’est totalement inutile d’autant plus qu’il y a un portique à l’entrée de la promenade. Et puis c’est illégal car depuis 2009 les fouilles doivent être justifiées individuellement. C’est contre ça que je me bats. J’ai gagné pour moi : ils ne me tripotent pas, ni au QD (où, du coup, ils arrêtent aussi pour les autres), ni en bâtiment (où je sors une minute après toutes celles qui l’acceptent sans broncher, y compris les Basques). Par contre, ils me forcent (une fois à douze dont quatre casquées) à me déshabiller avant de rentrer au QD. Là aussi c’est illégal, mais comme on est moins nombreuses à y passer, la résistance sera plus difficile...
[…] Ça fait deux fois qu’ils mettent au mitard des filles très abîmées psychologiquement, en plein délire ou crise parano. C’est super éprouvant d’entendre ces cris toute la nuit, de sentir ces filles sombrer et de ne pouvoir apporter aucune réponse. Ici il y a un SMPR mais il est plein de déprimées craintives alors on ne peut pas y mettre les filles qui gueulent. Du coup, ils attendent qu’elles s’épuisent au mitard, en les laissant sans rien (ni vêtements ni tabac) pour qu’elles ne puissent pas les emmerder. Après, ils les droguent et les foutent au SMPR. Et après ils nous demandent du respect ces salauds !
Je ne sais pas comment finir cette lettre sur une note optimiste. Aujourd’hui, c’est jour de prétoire et j’ai deux nouvelles voisines. Peut-être une sera capable de jouer aux dames (« Je te mange ton pion blanc en C6 avec le mien qui est en B5, j’arrive donc en D7 »)...


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