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Venezuela, stade (suprême) du capitalisme

posté le 07/02/19 par https://blogs.mediapart.fr/charles-kabango/blog/040219/venezuela-stade-supreme-du-capitalisme Mots-clés  antifa 

De Kinsasha à Caracas, le spectacle quotidien d’un impérialisme décomplexé se déploie sous nos yeux. Autrefois, on pouvait compter sur la conscience d’un Lénine, auteur d’une excellente brochure documentée, chiffrée, et argumentée sous le titre tonitruant de "L"impérialisme, stade suprême du capitalisme". Plus d’un siècle après, hé bien, nous y sommes encore.

Soyons vifs et concis. L’agitation putschiste des démocrates, des libéraux et des fascistes du bloc occidental ou péri-occidental autour du Venezuela peut se résumer en un mot : l’impérialisme.

Par conséquent, il n’y a rien de fondamental qu’on puisse retenir des multiples débats auxquels se livrent journalistes, experts et expatrié (e)s venezuliens/venezuliennes sur les plateaux de télévision. Rien à retenir des discours de "démocrate" sur la fameuse "dictature Vénézuélienne". Rien à retenir des donneurs de leçons du dimanche. Rien à retenir des professeurs en bonne gouvernance. Rien à retenir de journalistes qui sont allés faire du tourisme - peut-être pas sexuel -au Venezuela, et qui nous reviennent, munis de quelques informations sur la constitution de ce pays, les élections, et croient maintenant pouvoir nous expliquer ce qui est en train de se jouer. Rien à retenir des confessions intimes de certains exilés vénézuéliens, qui n’ont droit qu’à la parole, parce qu’ils servent de caution morale, de justification droit-de-l’hommiste aux impérialistes-humanitaires. Ça va de pair. Rien à retenir de cette lettre ouverte de Rosmit Mantilla parue dans Le Point : Monsieur Mélenchon, avez-vous une conscience ?. Pourquoi n’en aurait-il pas ? Bien sûr qu’il en a une, monsieur Mélenchon. C’est la moindre des choses, qui plus est, lorsqu’on est parlementaire de gauche. Monsieur Trump, lui, il aurait une super conscience... et pas Mélenchon, pourquoi ? Pour rien..... Donc, disais-je, rien à retenir des cours de gestion du Figaro la manne pétrolière.

Jusqu’à preuve du contraire la crise économique de 2008 qui a impacté le monde, y compris le paysans du Massaï, n’était pas du fait de la mal gouvernance vénézuélienne. Ce sont les USA, comme toujours, bardés de leur certificat de bons gestionnaires, de bons économes, qui ont plongé ce monde dans la dépression. Ce n’est ni Chavez, ni Maduro qui se sont amusés comme des "fous" à créer des produits financiers toxiques. Ils ont peut-être été de piètres libéraux, de piètres investisseurs, de piètres faiseurs de profit...mais niveau corruption et mal gouvernance, en réalité, ils sont au bas de l’échelle. Le pays le plus corrompu et corrupteur de la planète reste le gendarme de ce monde. Parfaite logique du capital.

Le ré-ensauvagement de l’Occident

La barbarie occidentale n’est pas un concept, une vague idée, une vaine provocation. C’est une réalité qu’il faut avoir le courage de constater. Cette barbarie, et c’est là tout son génie, s’appuie sur des principes épurés, purifiés en matière de "droits de l’homme", et bientôt "droits de la démocratie". Puisque désormais au nom de cette "démocratie" tout est justifiable, tout est possible. On décapite Saddam Hussein sous le prétexte que....On bombarde Tripoli en soulignant que...On soutient le bordel à Damas parce que...On ferme les yeux en RDC pour la bonne raison que...On déstabilise le Venezuela en prétendant que....On soumet prodigieusement l’Afrique puisque que....On instaure quelques chaos au Proche-Orient...Bref, vous voyez le tableau.

Dans son précis Impérialisme, stade suprême du capitalisme, Lénine rapporte qu’un certain journaliste du nom de Stead, alors ami intime du milliardaire Cecil Rhodes, raconte que ce dernier lui disait en 1895, à propos de ses conceptions impérialistes :

"J’étais hier dans l’East-End (quartier ouvrier de Londres), et j’ai assisté à une réunion de sans-travail. J’y ai entendu des discours forcenés. Ce n’était qu’un cri : Du pain ! Du pain ! Revivant toute la scène en rentrant chez moi, je me sentis encore plus convaincu qu’avant de l’importance de l’impérialisme... L’idée qui me tient le plus à coeur, c’est la solution du problème social, à savoir : pour sauver les quarante millions d’habitants du Royaume-Uni d’une guerre civile meurtrière, nous, les colonisateurs, devons conquérir des terres nouvelles afin d’y installer l’excédent de notre population, d’y trouver de nouveaux débouchés pour les produits de nos fabriques et de nos mines. L’Empire, ai-je toujours dit, est une question de ventre. Si vous voulez éviter la guerre civile, il vous faut devenir impérialistes."

Nous y sommes. Et la dernière phrase de monsieur Rhodes jette un peu de lumière sur l’attitude de l’Union Européenne et d’un Emmanuel Macron vis à vis du Venezuela. Mais, pourra t-il réellement éviter la "guerre civile" en France même en étant impérialiste ? That’s question.

Et n’oublions pas l’Espagne, l’un des premiers pays européens à avoir reconnu Juan Guaido comme président intérimaire de la République bolivarienne du Venezuela. Voilà un pays qui n’a pas su obéir à sa rue, qui a refusé de soumettre au plus d’un million de catalans qui marchait dans les rues de Barcelone, afin d’accéder à leur indépendance, mais qui se presse à reconnaître un inconnu du parlement venezuelien, sous prétexte que le "peuple vénézuélien" en a marre. L’Espagne est plus sensible aux bruits qui circulent dans les rues de Caracas, plus sensible à l’auto-élection de Juan Guaido qu’aux revendications des catalans. Chez soi, force est à la loi, ailleurs force est à la force, force est à la rue qu’accompagne discrètement les canons.

L’Espagne est le pays qui a le plus bénéficié de la violente crise économique qui frappe le Venezuela. De grosses et grandes fortunes vénézuéliennes ont pu, dès l’achat d’une propriété à plus de 500.000 euro, jouir d’une "golden visa". N’est-ce pas là une immigration ultra choisie et désavantageuse pour le peuple vénézuélien dont on nous disait qu’il manquait de médicaments ? Bien sûr, lorsqu’il faut trouver le responsable de la misère des populations, c’est l’unique et "incompétent" Maduro...qu’il faut à tout prix dégager.

Il se passe au Venezuela, ce qui s’est déjà passé dans plusieurs pays d’Amérique latine ces derniers, le basculement du pays dans les mains des libéraux. Un basculement qui s’accompagne d’une profonde "criminalisation" du chavisme, du socialisme....et pour parler comme Bolsonaro du "communisme". Et donc plus jamais ça. Quitte à faire venir des fascistes au pouvoir, pourvu qu’ils soient libéraux, pourvu qu’ils acceptent le "jeu démocratique", le cirque électoral. Il se passe au Venezuela, un fait banal du capitalisme actuel : le "zonage". C’est à dire l’affaiblissement d’un Etat, voire sa destruction anarchique, dans un but de pur contrôle, prédation et exploitation des ressources. Lénine écrit justement : "Plus le capitalisme est développé, plus le manque de matières premières se fait sentir, plus la concurrence et la recherche des sources de matières premières dans le monde entier sont acharnées, et plus est brutale la lutte pour la possession des colonies."

Mais le concept de "zonage" indique bien qu’on est passé à une autre forme d’exploitation, ou de "civilisation". On n’est plus véritablement dans le partage du monde ou de l’Afrique tel qu’on l’a vu en 1885, mais on installe, on laisse s’installer ça et là des zones de non droit (en RDC, bientôt au Cameroun avec ce fameux conflit "anglophone", Nigéria, Mali , Daesh., Libye, Soudan...).

Le vrai sujet est celui de la dictature du capital. Le vrai débat doit porter sur l’impérialisme américain ou l’impérialisme occidentale. C’est ce climat d’impérial-nationalisme qui va nous conduire inexorablement vers la guerre. Et comme d’habitude, nos médias loin de nous éclairer réellement sur ce qui se passe, loin de mettre les vrais mots sur les authentiques maux, ont simplement fait tourner en boucle le message des capitalistes, des fascistes, des nationalistes, des "démocrates" à deux tours.


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