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Les GAFA et la loi de la valeur

posté le 19/04/18 par  Gérard.Bad Avril 2018 - spartacus1918.canalblog.com Mots-clés  économie 


Les GAFA et la loi de la valeur

http://spartacus1918.canalblog.com/archives/2018/04/19/36325445.html

Nous sommes d’ accord pour dire que les GAFA ne créent pas de valeur tant qu’ils se positionnent comme une médiation qui n’ a pas plus d’ importance que la publicité. Encore que cette médiation est bien particulière du simple fait que sa ramification pénètre partout1 pour prélever de l’information en temps réel, dont les GAFA font ensuite commerce. Nous pouvons dire que l’informatisation de la société est l’ infrastructure sur laquelle se greffe celle des GAFA ; que cet ensemble forme « la nouvelle économie ».

Il en résulte que les GAFA se présentent, comme les nouveaux donneurs d’ ordre du capital , ils s’apparentent en cela au capital financier qu’ils semblent menacer du simple fait de leur capacité à accumuler de l’ argent très rapidement. Cette masse d’ argent, si elle reste en jachère va tendre à se dévaloriser, ce n’ est certes pas l’objectif des GAFA, et nous verrons que le trésor de la nouvelle économie ne tardera pas à s’insérer dans le capitalisme historique et à en changer la donne. Il faut entendre par donne la capacité des GAFA à devenir des donneurs d’ordre, des gestionnaires en amont du capital productif de plus-value. L’argent accumulé des GAFA devra inévitablement être investi pour ne pas se dévaloriser, c’est ce qu’ils font, pour élargir et asseoir un peu plus leur situation monopolistique. En mai 2016, Apple annonçait vouloir investir 911 millions d’ euros dans l’ industrie de pointe sur les 228 milliards d’ euros2 de liquidités dont il dispose.

- La tendance inverse va aussi se manifester et se manifeste déjà, des entreprises du secteurs industriel, passent des accords et des partenariats avec des start up afin d’ éviter de perdre le contrôle de leur industrie. Waymo, la filiale de Google veut lancer une flotte de véhicule sans chauffeur par une commande de milliers de Chrysler Pacifica au groupe Fiat, Chrysler. de même entre Volvo et uber. Le numéro un mondial de l’ameublement Ikea va racheter la startup américaine TaskRabbit, qui permet de trouver dans son quartier un bricoleur amateur pour monter une étagère ou repeindre un mur. L’ avionneur Boeing voulait s’ associer avec un Gafa pour développer un satellite relayant l’ internet haut débit, l’ objectif étant de couvrir au moindre coût, les 70% du globe non couvert par le réseau à ce jour. D’ autres comme SpaceX ou OneWeb, propose de déployer 4000 petits satellites en orbite basse. Au final Google c’ est payé le fabricant de drones solaires Titan Aerospace3. Facebook, ne voulant pas rester sur la touche envisageait racheter un spécialiste des drônes Tech Crunch. Nous voyons que la « silicolonisation de la planète est en marche » comme une force de destruction/créatrice, qui sous des aspects « humanitaires » se présente au niveau politique comme une superstructure étatique mondiale, un trou noir absorbant et réifiant des pans entiers de l’ économie mondiale.


La dite tertiairisation de l’ industrie

Il y a un rapport fort intéressant4 qui parle de la tertiairisation de l’industrie, du fait justement que ces nouveaux donneurs d’ ordre des services prennent le contrôle de la gestion des secteurs productifs et se comportent comme le capital usuraire en captant de la rente énorme pour un capital constant dérisoire, tout en s’ appuyant sur ce qui s’ appelle l’ économie collaborative.

« Si les Gafa peuvent fournir du service universel, elles prélèvent des rentes massives et sans impôts. C’est un vrai problème pour l’ensemble des États où elles développent leurs activités. » (Les nouveaux rapports industrie/services à l’ère du numérique P26)

Nous retrouvons cette angoisse du capital historique dans de nombreux rapports. Le capital financier lui même s’ en trouve affecté et cherche une porte de sortie. En effet le capitalisme qui extrait de la valeur (plus-value) se trouve en difficulté : d’une part par la loi qui le pousse constamment à innover (plus de productivité) pour compenser la baisse du taux de profit par la masse de profit. Pour y parvenir, il est contraint de passer sous le fourches caudines du capital de prêt (manque permanent de liquidités) pour combattre et écraser les concurrents. Le capital de prêt est borgne, il ne voit que l’ argent qui doit rapporter de l’ argent selon la formule ( A-A’). Les nouveaux venus dans l’ arène du capital sont de la même espèce, et il ne pourra pas y avoir plusieurs sangsues sur un corps déjà intrinsèquement malade. Par intrinsèquement malade il faut entendre par la que le capital est son propre ennemi, parce qu’il doit constamment éliminer des forces de travail vivantes qui le font vivre. En somme sa destinée et d’ éliminer le plus de force de travail pour rester sur le marché tout en sachant qu’il scie la branche sur laquelle il est assis.

« La véritable barrière de la production capitaliste, c’est le capital lui-même » (Marx, Capital, Livre III, La Pléiade, T.2, P. 1031-1032)

Actuellement on nous reparle de la fin du salariat, comme le socle de la « nouvelle économie » et les états adoptent des lois allant dans ce sens1 . Ils réduisent à néant les acquis sociaux et ruinent toutes les espérances de la sociale démocratie,des partis socialistes et leur credo de réformes devant mener au socialisme intégral, d’ ou la grande débandade de ces partis et avec eux de la démocratie parlementaire et du syndicalisme. Les GAFA ne pourront survivre qu’en se coulant et modifiant les superstructures du capitalisme historique, ils vont s’attaquer à cette tâche en fusionnant leurs services avec l’industrie, c’est- à- dire en les incorporant au tissu industriel.

Le rôle rationalisateur des GAFA.

De par la situation qu’ils occupent dans l’ économie capitaliste,les GAFA agissent en ce moment principalement dans la sphère de circulation du capital y compris la logistique. S’ appuyant sur les technologies de l’information et de la communication (TIC)6 qui ont amplement brisé les frontières ou les salariés laissaient leur exploitation à la porte de l’ entreprise. Avec les TIC le salarié est joignable partout et travaille partout.7 Les GAFA vont amplement utiliser les TIC et même comme Apple devenir un fabricant de smartphones de plus en plus perfectionnés. Les possibilités de communications et d’informations sont immédiatement mondialisées et analysées par ceux qui tiennent pour le moment les manettes des algorithmes.

Certains à juste titre contestent que les GAFA soient un bloc unique, ce qui nous intéressent ici ce n’ est pas ce qui les distinguent mais ce qu’ils ont en commun. Les GAFA ont en commun de faire partie de la sphère de circulation du capital sur laquelle ils interviennent en cherchant à réduire le temps de circulation aussi bien des marchandises que des service en utilisant l’infrastructure de l’internet qu’ils veulent contrôler à l’échelle globale et mondiale.

- Si nous prenons les GAFA dans leur statique, ils font partie de la sphère de circulation du capital, seulement le capital est capital circulant, c’est son mouvement d’ ensemble qui lui permet de se valoriser. A ce niveau de réflexion il nous importe peu de savoir si les GAFA son créateur de valeur puisque le problème fondamental pour valoriser le capital c’est son mouvement global, mouvement qui finalement permet de réaliser la plus-value par la vente des marchandises. Les GAFA et tout ce qui caractérise la nouvelle économie, sont entrés dans ce mouvement global comme élément rationalisateur de cette circulation du capital. Marx explique clairement les conséquences d’une non fluidité des deux grandes sections.

« Aussi longtemps qu’il reste dans l’une de ces phases et qu’elle n’ est pas fluide-or chacune d’ elles a sa durée propre-, il ne circule pas, il est fixé. Aussi longtemps qu’il demeure dans le procès de production, il n’ est pas en mesure de circuler, c’est à dire qu’il est virtuellement dévalorisé.

Aussi longtemps qu’il demeure dans la circulation, il n’est pas en mesure de produire ni de créer de la plus-value ; il ne progresse donc pas en tant que capital. Tant qu’il ne peut être jeté sur le marché, il est figé sous la forme de produit ; tant qu’il demeure sur le marché, il est immobilisé sous la forme des marchandises » (grundrisses 3 chapitre du capital ed. 10/18,p. p. 197 )

Les GAFA et toute l’ infrastructure informatique sur laquelle ils s’appuient apparaissent comme le diable et le bon Dieu pour le capitalisme historique et ses États, comme une destruction créatrice dangereuse pour de nombreux secteurs économiques.

La destruction créatrice des GAFA

Visiblement les GAFA américains, ont un effet destructeur qui inquiète : les États, le capital financier, le commerce et l’ industrie . Les États y voient un pompage illégal de leurs recettes fiscales, les banques et les assurances une décomposition de leur métier et l’industrie une captation en amont de leurs compétences . Quant au salariat il attends les dégâts de la machinerie numérique et la précarisation de son statut, voir sa transformation en auto-entrepreneur de soi.

Quelques exemples non limitatifs, démontrent cette tension au sein du capital.

Le capital financier aux prises avec la concurrence conjuguée des fintech8 et des géants du web

« L’on pensait que l’arrivée des fintechs dans la finance sonnait le glas des grandes banques. Pourtant force est de constater que malgré le bouleversement qu’elles ont produit en apportant une réelle innovation dans un domaine vieux comme le monde, elles sont encore loin d’accumuler d’énormes parts de marché. Non, le vrai danger vient des grandes entreprises du web comme Amazon, Facebook et Google. Pour quelles raisons ? Pour l’heure, les entreprises financières à l’instar des assureurs et des banques de Wall Street s’appuient sur ces géants de la technologie pour leurs compétences stratégiques sensibles, a expliqué Jesse McWaters, auteur principal de l’étude WEF. »

En apparence il y aurait une contradiction entre le secteur financier et les géants du web, mais comme ceux-ci participent à la rationalisation du secteur tertiaire c’ est-à-dire celui du procès de circulation du capital les banques et tout le secteur financier les utiliseront « pour leurs compétences stratégiques » Il faudra simplement qu’ils s’ accordent entre eux sur le partage des profits.

En ce qui concerne le salariat du secteur financier, il est « dans le couloir de la mort » condamné par le développement des nouvelles technologies, leur avenir est de devenir des micro travailleurs ou micro tâcherons de « l’ économie numérique » ils sont près de 90 millions dans le monde. En 2017 les licenciements et fermetures d’agences bancaires ont été particulièrement nombreux.


La médiation des GAFA peut-elle durer dans le temps ?

Poser cette question c’est chercher à y répondre, la bourgeoisie puise tout son dynamisme dans la valeur d’échange ( l’argent) qui la fait apparaître comme une médiation entre les extrêmes que sont la valeur d’usage et la valeur d’ échange. Ce faisant elle se présente comme la synthèse de tous les contraires, pareil au christ dans la sphère religieuse, qui se présentait comme le médiateur entre Dieu et les hommes, prenant ainsi plus d’importance que Dieu lui-même. L’argent est donc la médiation universelle et à ce titre devient lui aussi le Dieu sur terre, pour finir par s’autonomiser en capital financier. La valeur d’ échange opère toujours comme intermédiaire. Aussi l’argent dans la circulation simple du capital est il l’intermédiaire entre la production et la circulation.

Comme le temps de circulation représente une limitation de la productivité du travail et augmente le temps de travail nécessaire, il diminue l’extraction de la plus-value9. Ces faux frais du capital sont une véritable barrière à l’ autovalorisation du capital, barrière que les GAFA contribuent faire tomber. Comme nous l’ avons déjà dit, tant que les GAFA agissent dans la sphère de circulation, ils ne sont aucunement créateur de plus-value, tout au plus ils contribuent à réduire les faux frais du capital dans cette sphère.

Les débats sur ce que nous pouvons appeler la nouvelle économie sont encore loin de se terminer, il faudra y revenir sur de nombreux aspects et plus particulièrement dans nos prochains articles sur les conséquences pour le salariat et le monde du travail en général .

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