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Clignancourt : FINI DE RIRE

Clignancourt : FINI DE RIRE

Le tract ci-dessous revient sur des évènements récents en rapport avec l’occupation de la fac de Clignancourt, sur quelques pratiques de bureaucrates fanatisés par l’ivresse éphémère d’un petit pouvoir acquis sur le dos de la lutte, ne répondant qu’à des logiques de représentations politiques et électorales – comme c’est toujours le cas avec les partis et leurs sbires. A la suite de ce tract, un récit de la diffusion, pour le moins agitée, de ce texte au sein de la « fête de l’occupation » qui se déroulait dans la soirée du 6 juin (et qui, en réalité, n’est autre qu’un toast porté à l’abandon prévu de l’occupation par les politiciens).

Par un bel après-midi ensoleillé de mouvement, nous décidâmes de nous rendre dans un lieu dont une espèce de bureau politique auto-institué nous avait formellement interdit l’accès : l’occupation de Clignancourt (cf. Paris IV occupée : les proto-flics dégagent des étudiants de leur université !). Nous étions alors deux, l’un étudiant à Paris 4 sur la liste noire du Comité Central, l’autre encore inconnu au bataillon. En effet, à 15 h était prévu une AG lycéenne dont nous avions eu vent le matin même lors du rassemblement/manifestation du 29 mai et à laquelle nous entendions participer. Nous sirotions un jus de pomme en discutant avec d’autres bloqueurs et bloqueuses. Cette scène champêtre fut interrompue lorsque l’un de nous 2 reçut, par derrière, un coup de pied dans la tête et un autre dans le dos – signature des vendus de la cause de la veulerie internationale depuis toujours – alors que nous étions toujours assis. La surprise passée, ces coups de pied furent suivis d’un « Dégage ! », non pas en référence aux révoltes tunisiennes de 2011 mais bel et bien par volonté – stalinienne ? – d’exclure des occupants, désignés comme anarchistes, d’une occupation. Alors que l’un des membres du Komintern (autoproclamé sans humour bolchévique, référence toute nostalgique à Kronstadt sans doute) s’en prit à nous, un camarade, tentant de le contenir, essuya un coup de coude dans la mâchoire. Nous fûmes ensuite « raccompagnés » par un groupe d’une dizaine de personnes vers la sortie et l’un de nous, déjà connu du Politburo, fut sommé de ne plus revenir. Les vigiles dont c’est réellement le métier (encore présents après plus de 2 mois « d’occupation »...) intervinrent brièvement dans la bienveillance générale. Nous refusâmes de partir et restâmes à discuter avec un certain nombre d’occupants et d’occupantes qui s’opposèrent à la décision d’exclusion. Les personnes voulant notre exclusion n’hésitèrent pas au passage à nous accuser de divers actes de dégradations sous le nez des vigiles (tag « Mort à l’État », caméras débranchées...). Si nous sommes évidemment solidaires de ces actes, nous aimerions insister sur la gravité que représente la délation. L’exclusion à coups de pied et la balance semblent donc moins grave aux mouches à merdes du Komintern de Clignancourt que quelques dégradations banales, pratiques de basse intensité qui ont été en d’autres temps et lieux plus que répandus. Comme quoi bureaucrates, informateurs zélés, balances et vigiles s’entendent très bien.

Pour ces gestionnaires en culotte courte, respectueux de leurs cadres d’études devenus leurs cadres de vie, la sauvegarde de l’occupation est due non pas à la vivacité sociale du mouvement mais à la soumission individuelle de ses participants aux maitres et propriétaires des lieux : on ne va tout de même pas emmerder Bouygues (gestionnaire de la fac et célèbre constructeur de lieux d’enfermements divers) et l’État... Après ces quelques évènements, nous nous installâmes dans ce qui semblait être la partie non occupée de la fac, c’est-à-dire près de la porte de sortie, assis avec une dizaine de personnes dont une dangereuse complice, étudiante à Paris 4 (et fichée A comme Anarchiste). Notons qu’ici, est désigné anarchiste celui ou celle qui, hors des syndicats et des partis, refuse les logiques de soumission à l’autorité : « déviationniste » disait-on en Russie. Environ une heure plus tard, en cette plus si belle fin d’après-midi , un autre dangereux complice (lui aussi inscrit sur la liste noire de l’occupation) nous rejoignit, de bonne humeur en prime. Ce dernier n’avait même pas eu le temps de dire bonjour que notre fier bolcho, armé d’un mégaphone, l’apostropha de façon tonitruante. En bon keuf – respectueux des procédures – il fit à notre compagnon 3 généreuses sommations : « première sommation », « deuxième sommation », « dernière sommation ». En bon macho, il avança vers lui en mode « porte tes couilles, espèce de baltringue » comme l’a dit un de ses acolytes. Avec un certain courage puisque cette fois son adversaire n’était ni assis ni de dos, il continua à chercher le duel viril, poussa notre ami, qui, par réflexe, se défendit minimalement (par rapport à l’affront). Les vrais vigiles, ceux directement payés par Bouygues, intervinrent et tentèrent de calmer l’échauffourée. S’en suivi l’arrivée de quelques dirigeants du Komintern, qui profitèrent de la situation pour acter notre exclusion (cette fois-ci, pour avoir essuyé des coups, sans doute). Au final, il n’y aura pas eu d’AG lycéenne, ni pour nous, ni pour personne. Peut-être qu’au lieu d’exclure des révolutionnaires d’un prétendu lieu de lutte, nous ferions mieux d’utiliser nos forces dans l’accentuation de la conflictualité avec l’administration et en général. Les dégradations qui nous ont été assignées ont, ici, servi de chef d’accusation : nous avons vu la police, à quand le juge d’application des peines ? Nous n’appellerons pas d’avocat.

Et ce n’est pas tout. Non contents de faire les gros bras en occupation, les zélés bureaucrates traquèrent à deux reprises l’un de nous en manif. L’un, militant NPA, vint chercher des coups en multipliant les insultes à faire pâlir son antisexisme déconstruit, et, déçu de ne pas les obtenir – il a quand même contribué récemment à un texte qui atteste qu’on est des méchants violents la bave aux lèvres depuis plusieurs générations – il revint de plus en plus excité et déterminé à se faire frapper pour justifier la réputation qu’il cherche à nous faire, jusqu’à avoir été rappelé au calme par le SO de la manif. Le deuxième, militant de la JC (que d’autonomie ! Et quel honneur, vraiment, d’être traité d’anarchiste par le PCF) poursuivit notre compagnon dans la manif antifa en hommage à Clément Méric, sur la base d’un orgueil testiculaire revendiqué, à grand renfort d’insultes, homophobes cette fois, imposant ainsi un duel viril pour « régler » ce qui sembla devenir un différend très personnel pour lui. Rappelons qu’au départ de tout cela, il s’agit de points de vue divergents sur la lutte, comment la mener, comment la contrôler ou, au contraire, y contribuer.

Que de pertinence politique ! Que de débats constructifs ! Les petits staliniens tombés de la dernière averse comme des neiges d’antan veulent faire la loi, encore et toujours... En cette période de reflux des hypothèses maoïstes, staliniennes et autre apologues des massacres prolétariens et constructeurs de partis, il va falloir sérieusement se reposer des questions que l’on croyait pourtant réglées après un Xxe siècle de révolutions trahies et massacrées.

Par ailleurs, pour revenir à Clignancourt, nous aimerions rappeler que le problème est à la fois le fait qu’il y ait des chefs de comité de mobilisation, et qu’un comité de mobilisation séparé des occupants existe (ce dernier servant évidemment l’émergence de dirigeants, promis en général à un bel avenir dans l’hémicycle ou le patronat). Bref, ce comité est devenu un pur organe de pouvoir ayant pour objectif de maintenir la lutte sous son joug en empêchant, y compris par la force et la menace, toute remise question et tout débordement. Sous couvert de décisions pseudo-collectives, le Komintern exclut en dépit des avis divergents (« La sentence est irrévocable ! »nous a-t-on dit, comme dans Fort Boyard). Se faire traiter d’« anti-démocrates » par des nervis staliniens, c’est toujours drôle ! Nous rappelons notre refus de la démocratie au même titre que toutes les formes de gestion, étatique ou para-étatique.

Maintenant, l’heure n’est plus à la palabre et aux sourires. Jusque-là, l’exclusion n’était que discursive. Quand les lois s’accompagnent de coups, il est temps de se révolter ! Maintenant, la loi s’est armée, les petits flics ont reçus leurs mandats et ils frappent dans le dos. Ces pratiques inacceptables ne resteront plus sans réponse. Quant à vos enfumages virtuels, petits complots et autres amalgames malveillants sur les réseaux sociaux (on a le champ d’intervention qu’on mérite), à partir d’histoires qu’on ne sait quels mauvais souffleurs, sans doute aguerris dans l’art de la manipulation et du harcèlement, vous ont susurré à l’oreille et auxquelles vous ne comprenez rien, ils ne peuvent pas grand chose face à la réalité de vos comportements et à la réalité tout court.

P.-S.

Une diff de tract agitée

Ce texte a été rédigé afin d’être distribué à la fac de Clignancourt, alors que des occupants festoyaient la fin de « leur » lutte.

Nous étions quatre à le diffuser, ce qui nous a valu de nous faire sortir manu militari par quelques sbires qui ne connaissaient rien à toute cette histoire, assistés de vrais vigiles venus leur prêter main forte en nombre.

Tandis que certains, bien déterminés à nous rouer de coups, invitaient l’un d’entre nous à reposer un pied dans l’occupation pour régler ça avec toute la virilité qu’il faudrait – parait-il – avoir, à coups de « si t’es un homme », ne s’adressant bien sûr qu’aux deux d’entre nous qui correspondaient à leurs préoccupations.... D’autres paraissaient bien étonnés, une fois la manipulation dissipée, et, semblant s’en vouloir d’avoir contribué à « virer des totos et des anars », ils iront jusqu’à tenter de nous faire revenir dans l’occupation.

Certains occupants ont honteusement fait croire que nous étions des fascistes (!), et nous avons eu la surprise d’entendre tonner un « siamo tutti antifascisti », apparemment contre notre présence, par des inconnus instrumentalisés pour l’occasion, pour quelques minutes... On a aussi entendu des « c’est des anars, il faut les virer » qui laissent tout autant perplexe. Il semblerait même que pour certains de ceux qui nous ont viré, la différence entre fasciste et anarchiste n’est sincèrement pas bien claire (c’est des anars, donc des fascistes...). C’est l’enfumage de la honte. Après nous avoir foutu hors de leur propriété universitaire précaire avec des coups, la plus zélée des bureaucrates a réuni les vigiles de Bouygues autour d’elle pour leur signaler du doigt les quatre indésirables, de manière à s’assurer, comme une bonne concierge, que nous ne puissions plus nous faufiler insidieusement et troubler leur petite sauterie avec notre texte.

Tout cela pose question…

Qu’est-ce que c’est, pour ces gens, aujourd’hui, l’anarchisme et l’autonomie ? Qu’est-ce que c’est le fascisme ? Mais surtout, qui sont ces gens qui entretiennent volontairement une confusion entre ces termes ? Qui sont ces gens qui ne réfléchissent pas 30 secondes pour comprendre une situation qui ne comporte aucune espèce d’urgence, préférant exécuter les ordres donnés par quelques bureaucrates médiocres (la plupart trotskistes et encartés), pour finalement se rendre compte deux minutes plus tard qu’ils sont en désaccord avec ce qu’ils viennent de faire ?

Face au silence de l’idiotie méchamment bureaucrate, solidarité avec celles et ceux qui interviennent dans le mouvement actuel sur la base d’élans révolutionnaires. La route est minée par les fluctuations extrêmes d’une extrême-gauche réformiste en crise de foi et d’électeurs. Autonomie !

[ Repris de Paris Luttes Info ]


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