Nicaragua : Trois mois de manifestations populaires Une clameur parcourt tout le pays : Ortega doit partir !

Les jeunes et le peuple du Nicaragua continuent à descendre dans la rue pour exiger le départ d’Ortega. La semaine dernière, il y a eu des journées massives de protestation et la deuxième grève nationale. Dans le même temps, la répression des groupes para-militaires gouvernementaux s’est intensifiée, en augmentant le nombre de morts à plus de 350. Les "négociations" promues par l’Église n’empêchent pas la progression de la mobilisation populaire révolutionnaire pour renverser la dictature.

Des milliers de Nicaraguayens sont descendus, à nouveau, dans les rues de Managua, Jinotega, Estelí, León, Granada et Masaya, entre autres villes, pour exiger la fin de la répression dans tout le pays et la démission d’Ortega. Il y a eu trois jours de protestation dans le processus de rébellion populaire initié le 18 avril contre la tentative du gouvernement d’imposer une réforme des retraites, convenue avec le FMI, qu’il a finalement dû retirer. Mais ce premier triomphe a renforcé le peuple nicaraguayen à poursuivre la mobilisation en demandant le renversement d’Ortega.

Le jeudi 12 juillet, il y a eu des marches et des sit-in massives dans les principales villes avec le slogan "Ensemble, nous sommes un volcan". Pendant la journée, des slogans ont été criés ou écrits sur des banderoles : "Ortega doit partir", "qu’est-ce que demande le peuple ?, que le boucher doit partir", "Le peuple du Nicaragua en a marre de cette dictature". Le vendredi 13, la deuxième grève nationale de 24 heures a eu lieu, à l’appel de l’Alliance Civique pour la Justice et la Démocratie (Alianza Cívica por la Justicia y la Democracia) - qui réunit des hommes d’affaires, des universitaires, des étudiants, des paysans et des organisations de la société civile - et soutenue par les chambres des patrons, qui ont rompu avec le régime lorsqu’elles ont vu le poids de la mobilisation. 90 % des magasins, supermarchés, centres commerciaux, grands distributeurs alimentaires, banques et stations-service ont été ajoutés, alors que les avenues étaient vides malgré le fait que le gouvernement garantissait les transports publics. Samedi, une caravane de véhicules a parcouru les quartiers de Managua qui sont assiégés par les milices cagoulées d’Ortega.

La vague de terrorisme orteguiste ne s’arrête pas.

Ces dernières semaines, Ortega a lancé une "opération de nettoyage" dans le but de démanteler les quelque 200 barrages routiers et blocus érigés dans tout le pays en guise de protestation et de défense contre les actions violentes des groupes para-militaires du gouvernement. Au milieu de cette offensive, le dimanche 8 juillet, 21 personnes ont été tuées dans les municipalités de Diriamba et de Jinotepe à Carazo, à une quarantaine de kilomètres de Managua, suivies d’une vague d’enlèvements de jeunes et de dirigeants syndicaux et paysans. Le lendemain, même un groupe d’évêques catholiques, qui tentaient servir de médiateurs, a été attaqué par ces groupes, ainsi que des journalistes et des travailleurs paramédicaux.

Selon le dernier rapport de l’Association nicaraguayenne pour les droits de l’homme (Anpdh), entre le 19 avril et le 10 juillet, plus de 350 personnes ont été tuées (principalement des jeunes de 18 à 30 ans) et 2.100 blessées. Il y a aussi quelque 260 personnes disparues : les forces dites "combinées" du gouvernement réalisent un plan de "chasse" de maison par maison à la recherche d’opposants.

La répression s’est poursuivie ce dernier week-end. Vendredi, 13 paramilitaires ont pris d’assaut le campus de l’Université nationale autonome du Nicaragua (UNAN), qui avait été occupé par une centaine d’étudiants pendant plus de deux mois, et ont assiégé l’église voisine pendant des heures, où les jeunes se sont réfugiés. Deux autres ont été tués et des douzaines ont été blessés. Dimanche 15, au moins dix personnes ont été tuées dans trois villes du Pacifique. La vague terroriste a conduit la poète et romancière nicaraguayenne Gioconda Belli, une ancienne guerrière sandiniste qui dénonce le gouvernement Ortega au niveau international, à avertir dans une interview avec une agence de presse allemande qu’"au Nicaragua, il pourrait y avoir un génocide sans précédent en Amérique latine".

Le dictateur ne veut pas négocier. Le peuple non plus.

Les attaques se sont intensifiées quelques jours après que le président ait déclaré qu’il n’abandonnerait pas le pouvoir et qu’il n’avancera pas les élections, en qualifiant tous ceux qui se manifestaient contre lui de " putschistes ". « Ortega doit partir ! » c’est toujours le cri dans les rues du Nicaragua malgré la répression sanglante du gouvernement. Même dans des villes comme Masaya, qui étaient les fiefs de la lutte sandiniste contre la dictature de Somoza dans les années 80 et qui sont maintenant un symbole de résistance contre l’ancienne guérilla sandiniste, les habitants se sont retranchés vendredi dernier pour empêcher l’entrée dans la ville d’une caravane dirigée par Ortega et son épouse, Rosario Murillo,.

L’Unité Internationale des Travailleurs - Quatrième Internationale (UIT-QI) rejette la répression d’Ortega et dénonce la "table de dialogue" qui cache le plan de l’impérialisme, de l’Église et du patronat pour trouver une solution négociée à fin d’anticiper les élections générales, l’impunité pour Ortega et la continuation d’une économie au service de ceux qui sont au-dessus de lui. De larges secteurs de la jeunesse et de la population se méfient du "dialogue" et ont donc continué à se mobiliser. Même des secteurs comme ceux de Masaya, qu’il y a quelques semaines avaient refusé l’appel à ériger des « tranques » (des blocages de rues et des barricades)

La UIT-QI appelle aussi à la plus grande solidarité avec le peuple nicaraguayen pour « À bas Ortega ! », Liberté des prisonniers politiques ! », « Justice pour les victimes et les libertés démocratiques ! Pour la formation de comités d’autodéfense populaires ! Pour une coordination de la jeunesse et de la paysannerie qui organise la mobilisation populaire révolutionnaire pour mettre fin au gouvernement patronal et répressif d’Ortega et avancer pour un gouvernement des travailleurs, des paysans et des jeunes !.

18 juillet 2018

Mariana Morena
Membre de l’Unité internationale des travailleurs (UIT-QI)


publié le 20 juillet 2018