Sorti début 2015, La Relève et La Peste est un projet porté par un étudiant issu de l’école de commerce ISC-Paris, Jérémie Carroy.
A en croire le site de l’école, il « a été sélectionné parmi les 40 meilleurs projets européens du site de crowfunding « Kisskissbankbank » », qui réunit les dons permettant de le financer
Le « crowdfunding » et non «crowfunding » comme écrit sur le site de l’école, de l’anglais « crowd » qui signifie « foule » et « funding » pour « recherche de fonds », qu’on pourrait traduire par « financement participatif », consiste à faire appel aux dons, aux prêts ou à l’investissement financier des Internautes pour financer un projet, souvent de nature culturelle.
Comme toute page confusionniste, celle-ci va avoir tendance à s’abreuver à la masse sous-culturelle déjà existante. La conséquence ici sera pour le moins fâcheuse puisque Huxley n’a jamais écrit cette phrase. Il s’agit en réalité d’une prosopopée rédigée il y a une quinzaine d’années par un professeur de théologie.
Dans le cas de La Relève et La Peste, le système choisi est celui du don avec contrepartie : plus le don est élevé, plus la revue offre de récompenses en nature (bracelet-marque page, invitation à la soirée de lancement, etc.). D’aspect professionnel, cette revue prévoit d’accorder une grande place au graphisme et, puisqu’il faut bien attirer le chaland, affiche l’ambitieux projet de développer un « nouveau concept » : le « livre-journal ». Il s’agit en fait bien d’une revue, soit une parution régulière (tous les six mois dans ce cas) au format livre, rien de vraiment original en somme.
Mais ce qui a attiré d’emblée notre attention n’est pas le concept en lui-même, mais bien le contenu éditorial que cette revue risque de proposer, ainsi que la nature de ses relais promotionnels sur le web. Soutenue, si on en croit son initiateur, par des personnalités classées dans le camp progressiste comme Edgar Morin ou Jean Ziegler
Curieusement, leurs noms n’apparaissent pourtant pas parmi les auteurs mentionnés au sommaire, et nous ignorons le degré réel de leur implication dans la fondation de cette revue.
La Relève et La Peste affiche en effet parmi ses contributeurs plusieurs noms associés au camp conservateur et réactionnaire.
== RABHI ==
Gabriel Rabhi, publiait le 6 février 2015 un article tiré du site négationniste SansconcessionTV.org – Pour une histoire débarrassée des nombreux mensonges (PHDNM), animé par le négationniste Vincent Reynouard.
On y trouve ainsi le « fils du grand Pierre Rabhi » (sic), Gabriel Rabhi, connu pour faire de la propagande soralienne et dieudonniste. Une ” réinformation ” mettant en scène
le site douteux les crises.fr, de Berruyer qu’on ne présente plus,
une vidéo de Vernochet, un nationaliste baignant dans le complotisme délirant,
voix de l’Iran, de Poutine, gravitant dans la dieudosphère et chez les complotistes, proposée par
media-presse-info, un site nationaliste réactionnaire organe de propagande de Civitas et enfin
Le Cercle Aristote, structure d’obédience néo-droitière.
Martin Peltier, figurant en bonne place sur le site Egalité&Réconciliation, a collaboré au Figaro Magazine, à National-Hebdo, à Minute et à Rivarol…
== IZAMBERT ==
Jean-Loup Izambert, journaliste ayant collaboré à plusieurs médias marqués tant à droite (Les Echos, VSD) qu’à gauche (L’Humanité) ainsi qu’à la revue d’extrême droite pro-Milosevic Balkans Infos (B.I.) ;
==MATTEI==
le philosophe Jean-François Mattei (décédé il y a peu), qui a conseillé dans les années 1990 François Bayrou quand il était ministre de l’Education et qui était proche de certains milieux nostalgiques de l’Algérie française (le Cercle algérianiste).
==AUTRES ==
On note également la présence de Christian Chavagneux, éditorialiste à la revue Alternatives économiques, qui elle est marquée à gauche et d’un commissaire divisionnaire et criminologue, Jean-François Gayraud.
Enfin, apparaissent les noms de deux universitaires, d’une réalisatrice de documentaires et d’un dessinateur dont rien ne nous permet de présumer de l’orientation politique.
Cristel Cournil et Benoît Mayer travaillent sur les questions migratoires et environnementales et notamment sur la question des réfugiés climatiques, tandis qu’Aurine Crémieu a réalisé des documentaires pour diverses chaînes de télévision, notamment sur des questions liées à la condition des femmes dans le monde.
Le dessinateur Bastien Nups dit NUPZ quant à lui, ne semble pas avoir pour habitude d’aborder explicitement dans son travail de thématiques politiques.
SOUTIENS
Etienne Chouard aime forcément ce personnage de droite radicale appartenant à un mouvement sectaro-religieux.
Du côté des soutiens au projet qui se manifestent, on peut noter que malgré le parrainage affiché de figures tutélaires comme Edgar Morin ou Jean Ziegler, le moins que l’ont puisse dire est que les médias dominants pas plus que des publications académiques ne se relaient pas au portillon pour en faire la publicité.
En revanche, La Relève et La Peste jouit du soutien
du Cercle des Volontaires à qui Jérémie Carroy et Gabriel Rabhi ont accordé des interviews promotionnelles,
de la webtélé conspirationniste Mr Mondialisation,
du site web confusionniste Inform’Action,
du portail d’extrême droite nos-medias.fr
ou encore
d’un site culturel également diffuseur de contenus complotistes, DiazePaM.fr.
IDEOLOGIE
Mais plus inquiétante encore est l’idéologie qui semble transparaître au visionnage du clip promotionnel, et qui ne laisse aucun doute quant à la ligne politique réelle que le projet entend mettre en avant. En effet, discrètement, par petites touches, ce « trailer », bien que promettant « une symphonie d’humanisme », inscrit "La Relève et La Peste" dans la lignée d’une idéologie impérialiste héritée de la période coloniale qu’on s’étonne de voir soutenue par des personnalités progressistes.
Le clip promotionnel de la revue, qui s’y présente comme « l’orchestre bienveillant » (sic) ne laisse aucun doute quant au public visé et à ses présupposés idéologiques. Introduit par des images de conflits, de famine et de pollutions a priori tournées exclusivement dans des pays non Occidentaux et dans lesquelles apparaissent des personnes pauvres (car il ne saurait y avoir de pauvreté, de conflits ni de pollution en Occident dans cette vision du monde), souvent noires, il enchaîne par une série de plans tournés dans de proprets appartements bourgeois occidentaux où n’apparaissent que des Blancs, hommes et femmes, seuls ou en couple (hétérosexuels bien sûr), avec ou sans enfants regardant par la fenêtre ce qu’on suppose être les malheurs du monde, de cet autre monde complètement étrange et étranger fait de guerres et de pauvreté qu’une voix off décrit et qu’on a pu entrevoir en début de clip.
Promotion active d’Etienne Chouard, l’ami de la fachosphère, et son tirage au sort.
Cynisme absolu ou sensibilité à la condition ouvrière, la confusion permanente cultivée ici permet sans doute de répondre “les deux”.
[1] cercledesvolontaires.fr/2014/12/05/releve-peste-nouveau-journal-alternatif-soutenir/